Hello Sapho, merci pour ton interactivité
Alors, tu nommes deux problèmes (que l'on retrouve parfois chez les polyamoureux, tu as vu juste), qu'on pourrait appeler (1) partage du temps et des sentiments et (2) durabilité des relations polyamoureuses.
(1)
Sapho a écrit :Seul problème, ma gène quand arrivant vers l'une mon coeur et ma tête sont encore un peu accroché à l'autre, je ne pourrais pleinement à chacune tout le temps et ça me mettra mal à l'aise. "Mon amour" ne se divise pas parfaitement en deux et je me sentirais toujours gêné car l'une "l'emportera" toujours sur l'autre.
Tout dépend de la définition qu'on donne à "polyamour". Certains polyamoureux disent aimer leurs amours exactement avec la même intensité. On pourrait les appeler les "égalitaristes". Les égalitaristes existent. Je n'ai aucune idée de leur proportion par rapport au nombre total de polyamoureux, mais j'ai déjà entendu ce discours : "moi, j'aime mes amoureux-ses tou-tes autant les un-e-s que les autres".
Quant à ceux qui ont une préférence pour l'une de leurs relations, on pourrait les appeler les "préférentialistes". Il semble qu'ils soient les plus nombreux. Parfois, cela ne pose aucun problème, les relations se réglant toutes seules d'elles-mêmes : a, b, c et d sont polyamoureux, a est avec b et c ; b est avec a et d, la préférence peut être réciproque : a préfère b et b préfère a. Quant à c et d, ils sont eux aussi polyamoureux et ont donc potentiellement d'autres relations qui les satisfont, et auxquelles ils attachent plus d'importance (avec e ou f). Je conçois que ce soit un cas de figure assez rare, idéal même
Ensuite, il y a tous les cas (nombreux) de déséquilibres, bien sûr.
(2)
Sapho a écrit :Second problème, l'avenir. Avec une personne unique, on pense à vivre ensemble, puis construire une famille, j'ai envie de construire ma vie avec une personne, mais si une deuxième personne s'ajoute à cet assemblage comment va-t-elle s’intégrer à notre vie ? Elle va finir par faire partir prenant de ma vie, et va vivre avec moi et ma copine, et peut être la copine de ma copine, et ... Donc, ça construira ainsi une sorte de petit monde plein d'amour, de tendresse, ce qui est bien mignon, car j'ai 23 ans, mais qui ne me sera d'aucune utilité quand j'en aurai 30 et que je souhaiterai créer une famille.
Là j'aurai 4 choses à répondre :
D'abord, il y a des polyamoureux (égalitaristes ou préférentialistes) qui veulent fonder une famille et le font. Voici l'exemple de Meta, qui a un projet de vie avec Thomas et porte son enfant, et qui est aussi avec Aurélien - elle a choisi Thomas pour avoir un enfant, mais dit aimer autant Aurélien que Thomas
http://polyamour.info/-bw-/Luc-Ferry-en ... evolution/ Luc Ferry met ensuite son grain de sel en disant que "ça ne durera évidemment pas"... mais il faut voir, seul le temps le dira.
Ensuite, sur la durée, il y a toutes sortes de relations, comme en monogamie : certaines qui ne marchent pas et cassent plus rapidement, d'autres qui durent. Je ne sais pas si le taux de relations "courtes" est vraiment beaucoup plus important en polyamour. L'exemple de Dwam, que je prenais tout à l'heure : cela fait de longues années qu'elle est avec son homme, et elle s'est tout de même mariée avec une femme. Elle n'envisage pas pour autant de quitter son homme. Ce sont des relations qui, si je ne m'abuse, ont toutes les deux plusieurs années.
Troisième petite chose, être polyamoureux permet parfois justement de maintenir une relation sur la durée : au lieu du traditionnel "je te quitte, j'ai rencontré quelqu'un", on obtient un "j'ai rencontré quelqu'un, et je veux préserver ma relation avec toi, comment on fait ?" Et au lieu d'une rupture on a dialogue, on a rapprochement... Pas à tous les coups, évidemment. Mais tout de même, il ne faut pas oublier cet aspect des choses : des polyamoureux vont dire "on me reproche de ne pas préserver mes relations ? mais justement, je les préserve bien plus, et elles durent bien plus longtemps, que si elles étaient monogames, parce que je ne mets pas toutes mes attentes dans le même panier que je poserais sur les épaules d'une seule personne".
Enfin, tu parles de "vivre à 3" (le fameux trouple), qui est un cas bien particulier. C'est une chose à laquelle je n'ai jamais réfléchi, et sur laquelle je ne préfère donc rien dire... Mais on peut imaginer, comme tu le dis, que ce n'est pas une configuration faite pour durer de longues années.
Donc, on a nommé deux problèmes, qui ont des solutions différentes selon les polyamoureux, ou bien parfois, pas de solution du tout ! et autant le reconnaître, oui, le polyamour a ses problèmes, il n'est pas une solution utopique. D'ailleurs redoutant ma propre jalousie, je ne l'ai toujours pas essayé, alors je pourrais me taire ou bien sortir, ok

. Mais n'oublions pas que la monogamie à long terme elle aussi a ses problèmes : est-ce qu'elle en a moins ? Rancoeurs, petites frustrations accumulées (pas nécessairement sexuelles), focalisation sur les défauts de l'autre au bout d'un certain temps, routinisation... Les polyamoureux disent : vous trouvez que le polyamour, c'est compliqué ? Essayez un peu la monogamie... C'est ce que se demandent les polyamoureux : non pas "comment faire du polyamour une utopie ?" mais "qu'est-ce qui s'avère le plus problématique ? polyamour ou monogamie ?"
La réponse peut varier pour chacun. Pour toi, la monogamie est peut-être moins compliquée. Je crois que pour moi (pour l'instant en tout cas) elle l'est aussi

car je n'ai pas encore assez travaillé sur ma jalousie et ma possessivité

. Mais faudrait qu'on en reparle dans 10 ou 20 ans... ce serait intéressant. Pour le moment, je connais assez peu d'histoires monogames qui sont allées sans drame au bout d'un certain temps, ou sans une grosse routinisation un peu triste. (Image de mes parents : ils passent les week-ends entiers chacun devant leur ordi, dans leur bureau, et pour ma mère les nuits aussi, pas parce qu'ils ont du travail, mais parce que mon père joue à des jeux vidéo et ma mère est sur les réseaux sociaux - autant dire qu'ils ne partagent plus grand chose. Image d'autres couples : trahisons, ruptures, "je suis tombé amoureux d'un(e) autre").
Note finale : un lien vers un très bel article sur "l'infinité des relations", écrit par un polyamoureux :
http://dwam.tumblr.com/post/2871307252/ ... -bounds-or