Je suis furieux après moi, je me déteste je suis un gros nul !
Tout à l'heure, un élève après discussion entre eux tournant autour "des pédés" me demande (avec mon intolérance aux insultes homophobes et mes actions de lutte contre les discriminations) : "Et vous, monsieur, vous êtes homo ?"
Et là je fais le pire du pire : j'hésite, bafouille un peu pour lui dire que ça ne le regardais pas. Il me lâche en aparté : "Si vous dites ça c'est que vous l'êtes..."
Faut dire le contexte : classe d'indus assez homophobe (sauf ce gamin-là) pas toujours facile à tenir, qui se dénigrent à longueur de temps (et qui dénigrent leurs profs) en s'insultant sans arrêt. Et puis, il y a un fond très humain, de gosses paumés mais qui, si on s'intéressent à eux, vous le rendent bien.
Celui qui m'a envoyé la question dans l'estomac est un pauvre gamin : enfant battu par son père (militaire en vadrouille qui ne rentre que pour cogner sur femme et enfants), il cherche toujours à se faire remarquer de peur de ne plus exister. Et pour se faire remarquer, toutes les conneries sont bonnes !) Je suis pour lui, le père de substitution qui l'écoute et ne le condamne pas, aussi j'ai droit à toutes sortes de confidences sur sa vie affective, sexuelle et ses désirs professionnels (l'armée, of course !) Il n'y aurait pas eu les autres, je lui disais tout de go.
J'ai eu les boules, la trouille qui m'est montée au ventre et qui ne s'est calmée que dix minutes après. Mais pourquoi c'est aussi dur de s'outer devant les élèves ? Moi qui le fait régulièrement pour tout un tas de gens, là je coince ! La seule fois que je l'ai fait, c'était à un élève ouvertement gay qui me posais la question et même si c'était devant toute la classe (de vente, classe plutôt féminine) c'était différent (du reste, les autres n'en avaient rien à battre). Mais avec eux, entre leurs transferts affectifs et leurs discriminations quotidiennes, j'ai merdé grave !
Je ne m'en remets pas parce que le pédé militant a merdé et le prof encore plus : combien il aurait été fort pédagogiquement que je leur déclare du haut de ma superbe : "Ben oui, je vis avec un homme et alors ? Qu'est-ce que ça peut vous faire ?" Quel impact, quelle classe !
Au lieu de ça , gêne et embrouille, avec un automépris qui me laisse une boule dans la gorge.
Je voudrais rattraper le coup mais bien que j'ai déjà envisagé 2548793 solutions, je suis bien perdu !

