Illustration de l'article

Comment bien réussir son premier coming-out

Par Fade Out, le

Ca fait pas mal de temps que vous pensez à ça... Vous venez de vous rendre compte que vous êtes attirés par les gens du même sexe, mais personne autour de vous ne le sait. Ou bien vous le savez depuis des années mais vous n'en pouvez plus garder ce secret pour vous seul.

Vous avez l'impression d'être dans une impasse, de ne pas savoir où aller, et personne ne peut comprendre votre problème !

Bref, vous avez besoin de vous confier à quelqu'un !

Mais à qui ? Et comment faire ?

(Pour des raisons de clarté je prendrais l'exemple d'un gay qui fait un coming-out à un garçon, mais bien sûr ce que je dis est valable pour les lesbiennes ou pour un coming-out à une fille !)

Choisir la bonne personne

Pour un premier coming-out, le choix de la personne est crucial.

Ne cherchez pas la difficulté, choisissez quelqu'un dont vous êtes pratiquement sûr qu'il le prendra bien, et pour laquelle cette "révélation" ne pourra vous causer aucun tort. Ainsi, dans le pire des cas il ne vous arrivera rien de grave. Ensuite vous pourrez passer (d'autant plus rapidement que ça se passe bien la pemière fois) à d'autres personnes qui comptent peut-être plus pour vous mais dont vous avez des doutes sur leur réaction.

Il faut bien sûr choisir quelqu'un dont vous êtes proches, mais pas forcément votre famille rapprochée (parents, frères et soeurs) car cela complique les choses.

Voici le portrait idéal, à mon avis, de celui à qui vous pourriez faire votre premier coming-out :

- vous le voyez assez régulièrement et vous parlez souvent de choses personnelles

- il a une grande capacité d'écoute et de conseil (il vous demande régulièrement si vous allez bien et écoute vos problèmes, par exemple)

- il a des amis homos, ou connait des homos

- il est gay friendly, ou du moins évite les plaisanteries homophobes (celles qui sont vraiment méchantes envers les homos)

- il est ouvert d'esprit (il a voyagé, connait beaucoup de monde, s'intéresse à beaucoup de choses originales)

- il est de la même génération ou du même milieu

- vous vous dites qu'il se doute peut-être que vous êtes homo

Evidemment, quelqu'un qui réunit toutes ces qualités est rare. Mais s'il répond à plusieurs critères (seuls les deux premiers sont indispensables), il y a déjà de bonnes chances que ça se passe bien !

A éviter pour un premier coming-out :

- les parents ou la famille, surtout si vous dépendez d'eux financièrement

- quelqu'un dont vous êtes secrètement amoureux (quoique ça se discute)

L'idéal est donc un ami du même âge que l'on fréquente régulièrement. Celui que l'on pourrait appeler "son meilleur ami" !

Choisir le bon moment

Le moment est aussi important que la personne. Vous aurez beau avoir un pote très gay-friendly, vous n'aurez pas pour autant réussi votre coming-out si vous lui faites dans le métro aux heures de pointe, ou pendant qu'il regarde pour la 257ème fois son film favori, ou encore à l'aéroport juste avant qu'il ne parte pour 6 mois à Barcelone !

Réservez au moins 1 heure tranquille, sans rien de spécial de prévu, où vous serez tous les deux en étant sûr de ne pas être dérangé et pouvoir discuter tranquilement. Par exemple à l'occasion d'un repas, d'un trajet en voiture ou d'une promenade.

Evitez les foules, le bruit ou la distraction (style télé), ou les moments où les amis ou la famille peuvent rappliquer sans prévenir.

Ce n'est pas toujours facile de trouver un moment comme cela, il faut parfois attendre plusieurs jours, mais ça vaut le coup, sous peine de rater son coming-out et d'être frustré de ne pas connaître le fond de sa pensée. Alors un peu de patience !

Le "truc du rendez-vous" (voir plus loin) peut vous aider à trouver en commun un moment où vous pourrez parler tranquilement.

Evitez aussi les moments d'émotion intense (par exemple , sous le coup de la colère, ou après une bonne ou mauvaise nouvelle) car c'est assez destabilisant pour l'autre, qui mélange les émotions, et risque de dire des choses qui dépassent sa pensée, ou de vous reprocher de lui avoir gaché un bon moment.

La méthode Essai/Erreur. Essaie encore !

Vous étiez pourtant très motivé, et toutes les conditions étaient là pour que vous lui parliez tranquilement. Cette fois c'était sûr. Mais au dernier moment, vous n'avez pas réussi, impossible de dire ces mots que vous viez pourtant répété 100 fois ! Vous vous sentez lâche et découragé.

Ne vous inquiétez pas, tout le monde passe par là (enfin sauf les hétéros bien sûr) !

Ce n'est pas la peine de se mettre la pression. Vous avez attendu des années peut-être avant d'en parler, ce ne sont pas quelques jours de plus qui changeront grand chose. Et puis généralement lorsqu'on est dans cet état là, le moment est proche où on y arrive !

Le truc du rendez-vous

Si vous n'arrivez toujours pas à faire votre coming-out, voici un truc qui a bien marché pour moi, et qui devrait marcher pour la plupart des gens qui stressent beaucoup.

Lors d'un coming-out raté, il y a un moment où vous êtes mal à l'aise, cela se voit que vous avez envie de parler mais vous n'osez rien dire.

Profitez quand même de l'occasion pour dire : "J'ai quelque chose d'important à dire mais je n'ose pas... Est-ce qu'on pourra se voir en privé une autre fois pour que je te parle de ça ? Par exemple demain ?"

Ca rend les choses un peu solennelles mais ça a le mérite de mettre l'autre à votre écoute. Et puis le lendemain vous ne pourrez pas vous défiler. Il saura que vous n'allez pas lui raconter de blagues. D'ailleurs ne tardez pas trop entre le moment où vous prenez rendez vous et celui où vous parler, car il pourrait se poser beaucoup de questions et s'inquiéter inutilement.

La solution de secours : la coming-out virtuel

Si vous n'est pas vraiment sûr d'être prêt, une bonne solution est peut-être de se confier sur Internet.

Evidemment, je ne saurais que trop vous recommander le forum du site Et-Alors.net) pour en parler.

Fille ou garçon, vous ne serez pas le seul à vous poser des questions sur votre sexualité. Sur EtAlors il y a des gays et des lesbiennes, bien sûr mais aussi des hétéros, des bis et des gens qui ne savent pas !

Vous ne serez pas le seul qui se sait homo depuis très longtemps et qui a attendu des années avant d'en parler à quelqu'un (je parle en connaissance de cause !). Alors inscrivez vous sur le forum, lisez les témoignages des autres, allez dans la rubrique Acceuil et présentez vous et votre histoire. Vous verrez comme ça fait du bien de parler !

Les premiers mots

Revenons sur le "vrai" coming-out. D'ailleurs à ce propos je conseille de le faire "en vrai", c'est à dire de vive voix, plutôt que par mail, messagerie ou téléphone. Il est important de voir la réaction de l'autre "en direct" !

C'est vrai que c'est difficile de parler à quelqu'un qui vous est cher, mais vous y arriverez.

Si moi j'ai réussi, tout le monde peut le faire (j'ai eu deux bonnes minutes de blanc avant de réussir à parler - et je vous assure que c'est long - mais je l'ai fait !)

Ne soyez pas trop direct au début, sinon il risque d'être choqué, de croire que c'est une blague ou de mal comprendre. Laissez lui un peu de temps pour comprendre petit à petit le sujet que vous allez aborder, et montrer que c'est sérieux et important pour vous, mais ensuite soyez franc.

Je vous conseille, au début, de parler de sentiments plutôt que de sexualité. Car pas mal de gens ont une image négative (et surtout très peu d'information) sur la sexualité homo.

Commencez par exemple par parler de la solitude, puis embrayez sur les sentiments que vous n'avez pas pour les filles... et ceux que vous avez pour les garçons.

Essayez de préparer quelques phrases, ou au moins l'ordre des sujets que vous allez aborder, mais je vous préviens, généralement on a prévu un texte et on oublie tout à cause du stress !

Ca ne s'arrête pas là

Un coming-out n'est pas juste dire "Salut ! Tiens au fait j'ai oublié de te dire la dernière : je suis gay ! Bon à la prochaine, hein ? Ciao !".

L'intérêt c'est, après avoir révélé son homosexualité, de pouvoir parler avec franchise, de profiter des conseils, d'avoir un avis extérieur sur ce que l'on vit. Bref, d'avoir un confident.

Donc il est important de parler juste après la "révélation", et aussi de continuer le dialogue régulièrement par la suite.

Vous pouvez par exemple raconter votre histoire, les choses que vous aviez caché jusqu'à maintenant pour ne pas vous faire repérer. Ou parler de différents sujets qui vous touchent et qui ont lien à l'homosexualité (l'homophobie par exemple).

S'il n'ose pas trop continuer la conversation, c'est peut être qu'il n'ose pas vous mettre mal à l'aide

Dans ce cas c'est à vous de le mettre en confiance et continuer le dialogue.

Posez lui par exemple les questions du type : "Est-ce que tu t'en doutais pour moi ?", "Voir deux garçons qui se tiennent par la main dans la rue ça te choque ?", "Que penses-tu du mariage homo ?"

Vous pouvez aussi parler de la représentation des homos à la télé, de vos connaissances communes qui sont gays, etc. Ou seulement de vos sentiments si tous ces sujets ne vous préoccupent pas !

Ce qu'il est important de comprendre c'est qu'un vrai coming-out (à quelqu'un qui compte) est une phase de dialogue qui peut prendre beaucoup de temps : d'une longue conversation de deux heures à de nombreux dialogues qui s'échelonnent sur plusieurs jours ou plusieurs semaines.

Question con, réponse... pédagogique

Il arrive parfois (rarement d'après mon expérience) que la personne soit très étonnée par votre coming-out, et soit très peu informée sur les homos. Dans ce cas on a généralement le droit à une série de cliché et de questions assez désarmantes.

Voici quelques unes de ces questions, auxquelles il vaut mieux avoir réfléchi par précaution, et une réponse que je propose.

"C'est pas grave, ça va s'arranger."

Ce n'est pas une maladie, ça ne peut donc pas se guérir.

"C'est ton choix." (ou plus subtil "Tu fais comme tu veux, mais...")

Non, justement, je n'ai pas choisi, je ne fais pas ce que je veux, ça aurait été plus simple pour moi si j'étais hétéro mais je dois bien assumer mon homosexualité ! C'est ça ou rester seul et malheureux toute ma vie !

"Comment tu peux savoir si tu es gay n'as jamais essayé avec une fille ?"

Et toi as-tu essayé avec quelqu'un du même sexe ?

"Comment tu peux savoir si tu es gay à ton âge ?"

Ca fait des années que je ne pense qu'aux garçons, je n'ai jamais rien trouvé de spécial aux filles. Toi (à mon âge) tu savais bien que tu étais hétéro, non ?

"Tu es sûr que tu ne pourras pas redevenir hétéro ?"

Pour redevenir hétéro il faut l'avoir été un jour ! Moi j'ai toujours été homo !

"Les couples homos ça ne dure pas longtemps."

Si, il y a des couples qui restent très longtemps ensemble ! Pourtant on n'est rarement aidé par la famille ou la société pour rester ensemble. Et puis les couples hétéros ne durent pas si longtemps que ça non plus !

"Deux mecs qui s'embrassent ça me dégoûte."

Pourquoi ? Moi ça ne me dérange pas quand un mec et une nana s'embrassent. Et je ne t'oblige pas à aimer les mecs ! Tu sais ce n'est pas contagieux, si un mec essaye de t'embrasser tu ne deviendra pas homo, et si une fille essaye de m'embrasser je ne deviendrai pas hétéro !

"C'est contre nature"

Faux, il y a beaucoup d'animaux qui sont homos.

"L'homosexualité c'est un truc à la mode."

Tu as déjà entendu parlé de la Grèce Antique ?

D'après les études il y a environ 5% de gays dans tous les pays et à toutes les époques.

Seulement on ne les laisse pas toujours vivre comme ils veulent, dans certains pays on peut être condamné à mort.

La seule différence c'est que maintenant les homos sont un peu plus visibles.

"Tu vas souffrir toute ta vie à cause de ça. Enfin, je dis ça pour ton bien."

Ce n'est pas parce que je suis homo que je souffre, c'est parce que les gens me rejettent ! Et puis je ne peux rien y changer ! Si tu me veux vraiment du bien tu dois m'aider à m'accepter comme je suis.

"Mais alors toi tu fais plutôt l'homme ou la femme ?" (c'est rarement posé comme ça, plutôt "Et comment vous faites ? C'est toi qui t'occupe du ménage ?")

Au cas où tu n'aurais pas remarqué je suis un homme ! Dans un couple gay, justement, il y a deux hommes et aucune femme !

"Tu es devenu homo parce que tu n'as pas eu une éducation religieuse assez stricte / ta mère t'a trop protégé étant enfant / tu as eu une expérience malheureuse dans ton enfance / tu jouais trop avec les filles / tu ne fréquentais pas assez de filles / blablabla / Saturne était dans son premier décan / blablabla / t'as trop mangé de pépitos / ... "

Et toi, tu est devenu hétéro à cause de quoi ?

Tu sais, il y a plein d'homo qui ne sont pas du tout comme ça, de toutes façons je ne peux rien y faire, pourquoi chercher une cause comme si c'était une maladie ?

L'épreuve du feu

Dans tous les cas, si ça ne se passe pas comme prévu, ne restez pas sur la première impression. Souvent les gens évoluent rapidement à votre contact, souvent au moment de la révélation ils ressortent les clichés qu'ils ont en tête depuis longtemps, car ils sont très peu informés sur les homos, mais au bout de quelques jours et un peu de réflexion ils changent d'avis.

A tous ceux qui me lisent et qui sont sur le point de faire leur premier coming-out, je leur souhaite bon courage ! Et quand vous l'aurez fait, n'oubliez pas d'en parler dans le forum !