C'est cadeau !

En février 2014, mon ex-copine m'a quittée.
A sa décharge, prenons le temps de resituer le contexte.
Six mois plus tôt, j'avais, sans le vouloir, grillé notre relation en la faisant passer au second plan. Une tuile familiale m'a poussée à me recentrer sur mes proches tout l'été. Puis je suis partie bosser en région parisienne en septembre ; ce fut le début d'une relation à distance qui allait être difficile à sauver, on le savait.
Au premiers frimas de l'hiver, elle s'est rapprochée du prof de musique du bahut où elle bossait et bam ! Chocapic. J'ai rien vu venir, jusqu'à ce qu'elle m'en parle courant janvier. Elle était perdue et ne voulait plus jouer sur les deux tableaux, mais ne savait qui choisir ; après quelques jours de réflexion, elle a préféré poursuivre sa route avec lui.
Soit.
Or la miss veut qu'on reste amies malgré tout ; pas de problème de mon côté, mais comme j'ai un peu les boules, je lui dis que j'ai besoin qu'on prenne de la distance pendant quelques temps. Il est évident que je ne lui en veux pas _on ne commande pas ses sentiments, après tout ! Et pas question de snober les trois belles années qu'on a passées ensemble ! Mais elle a besoin de parler de son nouveau mec et je ne me sens pas d'attaque pour être sa confidente. Elle se sent blessée et abandonnée par ma demande ; au début, elle peine tellement à s'y tenir et me sort des trucs tellement ambigus que je lui demande si elle veut qu'on se remette ensemble, ou bien.
"Ah mais non, pas du tout !
OK !!
Je me raccroche à la famille, au travail ; les amis sont loin mais les collègues sont très présents et je leur dois beaucoup. L'inspection se passe bien. Les mois passent. Petit à petit, je fais mon deuil de cette relation ; curieusement, j'encaisse bien, tellement bien qu'autour de moi on me demande si je l'aimais vraiment, cette fille ! Ben oui ! La distance, dans ce cas précis, a eu du bon. Ou peut-être que je me suis endurcie ? Moi-même je ne me l'explique pas, mais je réapprends à vivre pour ma gueule et merde ! ça fait du bien ! Quel bonheur de ne plus avoir à regarder où je mets les pieds, à me demander si j'ai les bons chaussons, si j'ai le droit d'aller dans la pièce d'à côté avec ou s'il n'y a pas un poil de chat sur mon manteau. Eh oui ! En me larguant, elle a aussi récupéré ses tocs ! j'avoue qu'ils ne me manquent pas.
Janvier 2015
Joyeux Noël, bonne année, voilà l'essentiel de nos échanges depuis l'été. Ca me va ; je crois que j'ai tourné la page _et ça me paraît toujours aussi incroyable de ressentir juste rien en pensant à elle, mais tant mieux ! Cependant, dans les semaines qui suivent, elle m'écrit à plusieurs reprises pour me raconter sa vie, son chômage, le fait qu'elle se soit résolue à postuler à des offres en région parisienne... D'ailleurs, est-ce qu'elle peut marquer mon adresse sur son CV pour ses prochaines candidatures ?
Ok, pas de problème ! Si je peux l'aider pour quoi que ce soit !
Trois jours après, elle m'annonce qu'elle a obtenu un entretien en région parisienne et me demande si je peux l'héberger. Je n'y vois aucun inconvénient. Elle vient, ça se passe bien, elle est retenue, signe un CDD de 6 mois et commence aussitôt son nouveau taf. Dans l'urgence, elle s'installe chez moi le temps de trouver un appartement. La situation me fait marrer, les premiers jours se passent dans la bonne humeur. Sauf que, avec un CDD, et pas de garants, bah on trouve pas d'appart...
Février 2015
C'est moins la bonne humeur. Si on a déconné un temps sur l'éventualité d'une colloc, on s'est vite rendu compte que ça n'allait pas être possible. Elle commence à prendre ses marques et par la même occasion, à voir les défauts de mon petit meublé un peu trop humide, un peu trop apprécié des insectes, aussi. On réorganise le mobilier en fonction de ses tocs. Eh ouais, ils sont toujours là, et ils m'oppressent beaucoup plus que quand on était ensemble. A tel point que je suis encore plus désordonnée qu'avant lorsqu'elle s'absente. Un vrai besoin de bordel. On parle du passé ; je la sens pas claire sur ses motivations à vivre avec moi et je me rends compte qu'elle a vraiment souffert à la fin de notre relation. Qu'elle a une rancoeur ; qu'elle aimerait bien me faire payer quelque chose, mais j'ai du mal à y voir clair...
Mars 2015
Je me sens de moins en moins chez moi. En fait, j'ai un problème que ceux qui m'ont déjà vue dans la vraie vie ont peut-être remarqué. Quand je suis seule, tout baigne. Mais dès qu'une deuxième personne arrive dans mon champ d'action, qui que ce soit, je m'écrase comme une crêpe et je n'arrive pas à m'imposer. Mon réflexe est de suivre, toute possibilité de prendre une initiative se fige illico. Avec elle, c'est pareil. Mes collègues, toujours présents, me font remarquer que je suis juste en train de me faire bouffer dans mon propre appart. Et qu'en plus, c'est quand même hardos de dormir dans le même lit que son ex... Il se passe vraiment rien ? Bah non, mais voilà j'ai un deux pièces, quoi...
Avril 2015
Ma "colloc", c'est comme ça que je l'appelle, parce que c'est plus classe que "mon ex" quand même, pète un câble complet dans cet appart "de merde". Elle me suggère d'en chercher un autre. Je ne veux pas lui répliquer qu'il faudrait qu'elle s'en trouve un à elle déjà, car elle se défonce pour de vrai et j'ai pas envie qu'elle se sente entretenue comme une pute. Il faut dire que mon luxueux garage reconverti me balance toutes les merdes les plus improbables depuis qu'elle est là : fuite d'eau, humidité persistante avec tout le moisi qu'elle entraîne, gros problème de plomberie _le PQ qui ressort dans la douche quand tu tires la chasse, connais-tu ?, grosses araignées (la vie !! y en avait pas des grosses comme ça l'été dernier !!), invasion de fourmis, la porte de l'armoire qui tombe sur sa gueule, et j'en passe... Pour la première fois depuis qu'on se connaît, elle me parle mal, se montre agressive. Du coup, on se prend la tête et je me surprends à rester dehors plusieurs heures pour la fuir pendant qu'elle s'efforce d'"assainir" les lieux "comme il se doit" parce qu'on "m'a pas appris à être propre". C'est vrai que mon appart est sans doute pas reluisant, que je ne suis pas maniaque, mais bon faut pas pousser mémé dans les orties. Ah, une chose est sûre : je fais pas beaucoup le ménage depuis qu'elle est là ! On peut pas lui enlever ça !
Mai 2015
La visite de sa maman _sur un très long week-end enfonce le clou. Ma pote m'a demandé de rester exprès pour qu'on sorte sur Paris, mais je vois tout de suite que c'est pas une bonne idée. Marie J. n'a qu'une envie : être seule avec sa fille, et on la comprend. J'ai l'impression de gêner, même si je comprends leur relation fusionnelle et la difficulté qu'elles peuvent avoir à gérer la distance elles aussi. C'est la première fois qu'elles sont séparées aussi longtemps. Les jours suivants, mon ex est plus remontée que jamais contre ma nonchalance, mon tapis de course _car ça fait de la poussière, et un tas d'autres choses. Il n'est pas impossible que sa maman m'ait cassé du sucre sur le dos, mais je n'ai pas envie d'en apprendre davantage ; ça me suffit amplement de savoir qu'elle a pété la chasse d'eau. Si ça se trouve, je ne la verrai plus jamais de ma vie, cette brave dame, alors bon...
Printemps, chaleur... période des soirées en tous genres. Au détour d'une conversation, je lui demande si je peux inviter deux potes parisiens à venir squatter en fin de nuit si besoin. Ils resteront dans la salle de séjour et ne mettront pas les pieds dans la chambre, j'aurai juste à déplacer deux matelas d'appoint. Non catégorique. Alors je m'en veux d'avoir demandé son accord. Après tout, c'est pas comme s'ils allaient se blottir contre elle. Mais, deux mecs ? Euh ouais, y a des chances... Ah non. NON !
Finalement, personne n'est venu.
J'ose plus inviter de gens chez moi ; mon cerveau a repris le réflexe toc : est-ce que cette personne a un chien ? un chat ? où l'installer pour qu'il/elle n'entre pas dans son "périmètre" perso ? Pourtant je mets un point d'honneur à ne pas TROP m'adapter, parce que ça ne ferait que renforcer son enfermement dans sa maladie.
Tu voulais te venger d'un truc que t'avais sur le coeur ? Ben c'est bon, on est quitte, là, car tu me fais bien chier ! On ne se supporte plus guère. Même sa façon de choisir ses Veloutés Fruix et de tater la "texture" à travers le pot m'exaspère. Son déo m'insupporte et les bougies d'ambiance au citron font très bien leur taf de répulsif sur moi, même si a priori je suis pas un insecte volant.
Oh, je crache sur elle, je la diabolise un peu, mais j'ai ma part de défauts et de mauvaise foi hein ! Soyons un peu fairplay.

"Sinon, tu vis toujours dans ton garage avec ton ex ?" Me demande parfois un pote quelque peu taquin.
Quelques jours plus tard, elle m'annonce qu'elle se tape un de ses collègues de travail. Elle n'ose pas en parler à sa mère et à ses amis, car c'est un homme mûr, marié et père de deux enfants. Du coup, elle ne peut s'en ouvrir qu'à moi ; je trouve la situation bizarre et légèrement agaçante. Non pas parce que ça me fait mal ou quoi, et loin de moi l'idée de la juger, mais parce que j'ai l'impression d'entendre les premiers émois d'une ado. Ah non, merci, j'en ai déjà 650 des comme ça qui me braillent dans les oreilles entre 8h30 et 17h30 !
Juin 2015
Vivement que le Ramadan se termine, qu'elle puisse enfin coucher avec le fameux daron ! Parce qu'en attendant, bonjour la déprime. Enfin, histoire de s'occuper, elle s'est résolue à libérer son studio dans le sud _ elle ne voulait pas le lâcher tant qu'elle n'était pas sûre d'être renouvelée. De mon côté, j'informe mes proprios que je vais rester une année de plus, si ça leur va. Eh ouais, je l'aime mon petit meublé moisi. Comme on ne pourra pas, concrètement, entasser son barda chez moi, elle va louer un box de rangement. Par contre, ça coince pour la location de la camionnette ; je lui propose de lui avancer la somme avant que mon cerveau ait pu me rappeler que la dernière fois que j'ai eu cette idée-là, j'ai jamais revu ma thune ; elle accepte. Sa carte ne passe pas, je lui envoie le numéro de la mienne. Si un jour elle décide de faire ses courses avec, je ne pourrai m'en prendre qu'à moi ! Y a même pas de "tu sais pas dire non" qui tienne, elle m'a rien demandé ! Je me console de ma connerie en me disant que, mine de rien, je lui aide à faire un pas de plus vers son nouveau chez elle_ loin, loin de chez moi ! Ouais, blague à part j'aimerais bien qu'elle s'en sorte et qu'elle se trouve un petit nid sympa.
Juillet 2015
Je pète un câble comme jamais depuis aujourd'hui. Je bous, je suis énervée bien plus que quand elle est partie avec son musicos, bien plus que quand elle essayé de me raconter ses histoires de te-cha avec lui.
Je suis partie du 93 depuis quinze jours et la miss est venue me demander quand est-ce que je comptais rentrer de ma campagne.
"Bah, je sais pas trop ! Mais je serai là au mois d'août !
_ Quand, au mois d'août ? Parce que je vais avoir de la visite.
_ Je sais pas... Mais pas de problème pour la visite, juste je vais faire mon asociale parce que j'aurai la rentrée à préparer.. Préviens tes invités !
_ Non mais... si t'es là, cette visite n'aura pas lieu.. Tant pis, on trouvera un autre endroit sinon..
Je comprends qu'elle veut ramener son mec pour baiser.
_ Bah, à partir du 15 je serai là de toute façon.
_ Tu rentres tôt... Je pensais que tu reviendrais la semaine d'après..
Désolée de vous déranger, meuf !.
J'ai très envie d'être désagréable et pas du tout conciliante, d'un coup. Pourquoi ? Bonne question.
_ Ben, je t'encourage à chercher ailleurs en effet, parce que le jour où je vais revenir, je te préviendrai pas forcément juste avant et je ne voudrais pas créer de malaise.
_ C'est si compliqué que ça de fixer ta date de retour ??
_ Eh oui !
_ Non, mais je t'en veux pas de rentrer à l'appart, hein... Tu sais j'aurais jamais cru te demander ça, mais comme tu m'avais dit que je pouvais...
Euh, j'ai dit ça, moi ?
Ah, oui. La fois où je t'ai dit que tu pouvais inviter ton mec un soir, et que je me coucherais entre vous deux quand vous aurez fini votre partie de boules. Cette fois-là. Merde, si on a perdu toute complicité au point de ne plus pouvoir ironiser...
Ca valait pas la peine que je m'excite pour si peu.
Enfin bref, je connais assez bien mon ex pour savoir que quand elle demande "si elle peut" faire quelque chose, c'est que c'est déjà fait depuis longtemps !
Et peut-être même qu'en ce moment ... ah ! beurk