Supportez vous la racaille?

Pour parler de tout et de rien, pas de thème imposé.
Kliban
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Re: Supportez vous la racaille?

Message par Kliban »

mystic a écrit :Justement, je ne vise personne. C'est plutôt des comportements que je vise, des rôles que certains endossent.

Le moralisateur en pleine masturbation cérébrale versant dans l'angélisme et le mépris de ces interlocuteurs. Lui seul détient la sainte vérité du haut de son piédestal et tout le monde à forcément tord même ceux qui ont vécu l'histoire tandis que lui ne l'a jamais même effleurée.

Le chevalier blanc qui sauve la princesse, mais veut-elle être seulement sauvée ? n'est-elle pas assez forte pour le faire elle-même ? peut-être a t'elle besoin qu'on lui donne une épée et non que l'on se batte à sa place ?

Le sophiste qui prend le devant de la scène avec son angélisme et ses mots savants soporifiques, il se moque éperdument des victimes, mais c'est lui le héros sans victoire que la presse gargarise.

Est-ce que sous cette version c'est plus facile à comprendre ? Plus précis ? :wink:
Certes, il n'y a rien de difficile à comprendre dans ce que tu dis, et je suis d'accord avec les trois points que tu invoques ici. Le contenu de tes interventions a toujours été clair.

Mais ton intention dans la discussion en cours ne l'est pas. Je ne parviens pas à voir à quoi exactement, dans ce que nous nous sommes dit, tu réagis. Tu ne cites rien, pas plus des échanges passés que de mon intervention récente, ce qui me met dans l'impossibilité de savoir ce que tu en penses - à la partie "donner une épée" près, que j'ai évoquée.

Or si tu épingles des comportements et des rôles, avec la franchise dont tu te réclames, il serait intéressant pour nous tou.te.s que tu reprennes explicitement les tournures de tel ou tel intervenant, nous montrant ces comportements que tu trouves moralisateurs, angéliques et méprisants, trop certains de leur vérité, ces attitudes de chevaliers blancs et ces sophistes qui se paient de mots. Sans quoi, bien que visés, nous aurons toujours la liberté de penser que nous ne somme pas concernés, et ton intervention ne nous permettra pas de nous remettre en cause, le cas échéant.
Kliban
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Re: Supportez vous la racaille?

Message par Kliban »

mystic a écrit :Ben justement, je ne suis pas moralisatrice, je ne pointe pas les gens du doigt, c'est à vous de vous remettre en cause tous seuls et de vous demander si votre comportement ne blesse pas les gens que vous prétendez défendre. Penser aux conséquences avant d'agir. Vous dire que vous faites peut-être fausse route.
Tu sais, on se demande ça tout le temps. Enfin... moi je me demande ça tout le temps, je ne peux pas parler pour les autres.
Du coup, j'ai aussi besoin de retours précis - à la mesure de ce que je crois avoir réfléchi les choses avant de les dire, et avoir pensé aux conséquences, multiples, complexes, entremêlées.
Sans ces retours, il m'est impossible de changer une voie que je crois juste - ce n'est pas de réfléchir plus qui pourra le faire, c'est réfléchir mieux - et pour cela, il est important de savoir là où un "mieux" est possible.
C'est le sens exact de ma demande, si d'aventure à tes yeux j'en venais à errer - demande à laquelle tu n'es bien évidemment en rien tenue d'accéder, juste un souhait que j'émets :)
Norma
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Re: Supportez vous la racaille?

Message par Norma »

mystic a écrit :@Kliban: A vrai dire, j'ai applaudi tes intervention réfléchies et pondérées, le simple fait que tu te remettes toi-même en cause, t'exclue de facto de mon propos.

A mon sens, je pense qu'on se méprend sur le traitement de cette problématique en voulant absolument des «gentils» et des «méchants». Il n'y en a pas toujours et la limite est parfois mince. Et l'on créer une nouvelle fois des catégories, donc des injustices, pour ceux qui sont inclus dedans mais qui pourtant n'ont rien fait.

Peut être serait-il temps de regarder le passé pour ce qu'il est : le passé, au lieu de s'en servir pour justifier de la haine des deux cotés ou une repentance démesurée. En quoi seriez-vous responsables de ce qu'on fait vos ancêtres ? Car leurs ancêtres à eux, n'ont pas colonisé, tué, violé ? De nombreuses familles comme la miennes sont nées des fruits de ces guerres. Pourtant, je ne suis et me sens coupable de rien. Privilège du métissage ?
Euh .... Où t'as lu que quiconque ici racontait des conneries comme ça ?

Le propos de mes petits camarades et moi même est assez simple et pas très ambigu, hein.
On est en train de dire que personne n'aime les incivilités, les crimes et les délits. Mais que dire "la racaille" et "ces gens là" pour évoquer des auteurs de voies de fait, c'est super amalgamant et ça laisse croire que tous les joggings baskets sont des repris de justice, ce qui est un peu couillon.

Personne n'est en train de dire que les "non-banlieusards" ou les "blancs" sont des méchants et les autres des gentils.
Tu travestis totalement nos propos en nous prenant en prime pour des flans. C'est irritant.
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Re: Supportez vous la racaille?

Message par »

Norma a écrit :
mystic a écrit :@Kliban: A vrai dire, j'ai applaudi tes intervention réfléchies et pondérées, le simple fait que tu te remettes toi-même en cause, t'exclue de facto de mon propos.

A mon sens, je pense qu'on se méprend sur le traitement de cette problématique en voulant absolument des «gentils» et des «méchants». Il n'y en a pas toujours et la limite est parfois mince. Et l'on créer une nouvelle fois des catégories, donc des injustices, pour ceux qui sont inclus dedans mais qui pourtant n'ont rien fait.

Peut être serait-il temps de regarder le passé pour ce qu'il est : le passé, au lieu de s'en servir pour justifier de la haine des deux cotés ou une repentance démesurée. En quoi seriez-vous responsables de ce qu'on fait vos ancêtres ? Car leurs ancêtres à eux, n'ont pas colonisé, tué, violé ? De nombreuses familles comme la miennes sont nées des fruits de ces guerres. Pourtant, je ne suis et me sens coupable de rien. Privilège du métissage ?
Euh .... Où t'as lu que quiconque ici racontait des conneries comme ça ?

Le propos de mes petits camarades et moi même est assez simple et pas très ambigu, hein.
On est en train de dire que personne n'aime les incivilités, les crimes et les délits. Mais que dire "la racaille" et "ces gens là" pour évoquer des auteurs de voies de fait, c'est super amalgamant et ça laisse croire que tous les joggings baskets sont des repris de justice, ce qui est un peu couillon.

Personne n'est en train de dire que les "non-banlieusards" ou les "blancs" sont des méchants et les autres des gentils.
Tu travestis totalement nos propos en nous prenant en prime pour des flans. C'est irritant.
non non Norma! Tu te trompes! Elle ne vise personne du forum voyons! C'est nous qui voyons le mal partout et qui "interpretons" ces propos... :roll:
ftx
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Re: Supportez vous la racaille?

Message par ftx »

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on pourra pas dompter nos langues, mais seulement on pourra les couper.
ftx
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Re: Supportez vous la racaille?

Message par ftx »

je me permets de vous faire suivre un texte que j'ai trouvé très enrichissant sur mon auteure préférée: Audre Lorde

j'espère qu'il sera aussi enrichissant pour vous qu'il a été pour moi.

Le lien avec ce fil de discussion est qu'il permet de réfléchir sur la colère, et le racisme, et la réponse des personnes racisées à le racisme:

ce n'est pas pour vous faire la morale, ni pour vous étaler mes connaissances,
en fait je ressens quelque chose du genre de l'indignation pour la manière comment ce déroule ce fil de discussion
mais je trouve pas les mots pour dire,
mais du coup je m'appuie sur ces étoiles écrivaines dans ma vie qui ont su mettre des mots justes
voilà ça c'est un cadeau, à garder précieusement si vous voulez :amour:


De l’usage de la colère : la réponse des femmes au racisme


par Audre Lorde



Titre original : « The Uses of Anger : Women Responding to Racism »

Le racisme. Croyance en la supériorité intrinsèque d’une race sur toutes les autres, et ainsi en son droit à dominer, manifeste et implicite.Les femmes répondent au racisme. Ma réponse au racisme est la colère. J’ai vécu avec cette colère, en l’ignorant, en m’en nourrissant, en apprenant à m’en servir avant qu’elle ne détruise mes idéaux, et ce, la plus grande partie de ma vie. Autrefois, je faisais tout cela en silence, effrayée par le poids d’un tel fardeau. Ma peur de la colère ne m’a rien appris. Votre peur de cette colère ne vous apprendra rien, à vous non plus.

La réponse des femmes au racisme signifie qu’elles répondent à la colère ; colère de l’exclusion, des privilèges immuables, des préjugés raciaux, du silence, des mauvais traitements, des stéréotypes, des réactions défensives, des injures, de la trahison, et de la récupération.

Ma colère est une réponse aux attitudes racistes, aux actes et aux présomptions engendrés par de telles attitudes. Si vos relations avec d’autres femmes reflètent ces attitudes, alors ma colère et les peurs qu’elle fait naître en vous sont des projecteurs qui peuvent être utilisés pour grandir, de la même manière que j’ai appris à exprimer ma colère, pour ma propre croissance. Mais comme chirurgie réparatrice, pas pour culpabiliser. La culpabilité et les réactions défensives sont les briques d’un mur contre lequel nous butons toutes ; elles ne conviennent à aucun de nos futurs.

Comme je ne veux pas que ceci devienne une discussion théorique, je vais illustrer ces points en donnant quelques exemples d’échanges entre femmes. Par manque de temps, je n’en donnerai que quelques-uns, mais sachez que ces exemples étaient beaucoup plus nombreux.

(POUR LE TEXTE COMPLET VOIR http://infokiosques.net/imprimersans2.p ... rticle=387 )

La colère est une réaction appropriée face aux comportements racistes, comme l’est la fureur lorsque les actes issus de tels comportements ne changent pas. Aux femmes ici présentes qui craignent plus la colère des femmes de Couleur que leurs propres comportements racistes intériorisés, je demande : est-ce que la colère des femmes de Couleur est plus menaçante que cette haine des femmes qui imprègne tous les aspects de nos vies ?

POUR LA SUITE DU TEXTE JE L AI MIS EN DEROULEMENT SPOILER SOUS LE CONSEIL DE l'équipe de modération. merciii :gentil:
Spoiler : :
Ce n’est pas la colère des autres femmes qui nous détruira, mais notre refus de nous arrêter, d’écouter ses rythmes, d’apprendre en son sein, de dépasser les représentations pour en toucher la substance, et d’exploiter cette colère comme une source importante de puissance.

Je ne peux pas cacher ma colère pour vous éviter la culpabilité, ni blesser les sentiments, ni répondre à la colère ; parce qu’agir ainsi c’est insulter et banaliser tous nos efforts. La culpabilité n’est pas une réponse à la colère ; c’est une réponse à nos propres actions, ou à une absence d’action. Si la culpabilité mène au changement, alors elle peut être utile puisqu’il ne s’agit plus de culpabilité mais du début de la connaissance. Cependant, trop souvent, la culpabilité est l’autre nom de la faiblesse, l’autre nom d’une réaction défensive qui détruit toute communication ; elle devient stratagème abritant l’ignorance et perpétuant les choses telles qu’elles sont, rempart ultime contre tout changement.

La plupart des femmes n’ont pas développé d’outils pour se confronter de façon constructive à la colère. Dans le passé, les groupes de conscience féministes massivement blancs, parlaient de l’extériorisation de la colère, habituellement contre le monde des hommes. Ces groupes étaient composés de femmes blanches partageant les termes de leurs oppressions. Il y avait généralement peu de tentatives pour énoncer clairement les différences sérieuses existant entre femmes, comme les différences de race, de couleur, d’âge, de classe sociale et d’identité sexuelle. À cette époque, on ne ressentait pas le besoin d’analyser les contradictions en soi, femme en tant qu’oppresseure. On travaillait à extérioriser la colère, mais très peu à exprimer la colère des unes envers les autres. Aucun moyen n’a été développé qui permette aux femmes d’appréhender cette colère des unes envers les autres, hormis l’éviter, la détourner, ou la fuir en se cachant sous un manteau de culpabilité.

Je n’ai aucun usage créatif de la culpabilité, la vôtre ou la mienne. La culpabilité est uniquement un moyen supplémentaire pour éviter d’agir en connaissance de cause, pour gagner du temps face à l’urgente nécessité de faire des choix clairs, face à l’approche de la tempête, qui peut nourrir la terre comme faire plier les arbres. Et si je vous parle avec colère, au moins vous ai-je adressé la parole : je ne vous braque pas un revolver sur la tempe pour vous abattre en pleine rue ; je ne regarde pas le corps ensanglanté de votre soeur en demandant : « Qu’a-t-elle fait pour mériter ça ? » Telle fut la réaction de deux femmes blanches à l’écoute du récit de Mary Church Terrell qui leur racontait le lynchage d’une femme Noire enceinte dont le bébé a ensuite été arraché de son corps. Cela se passait en 1921, et Alice Paul venait publiquement de refuser de soutenir l’application du 19e amendement [6] à l’ensemble des femmes - refusant ainsi d’inclure les femmes de Couleur, et ce bien que nous ayons lutté pour l’application de cet amendement.

Les colères entre femmes ne nous tueront pas si nous savons les formuler avec précision, si nous écoutons le contenu de ce qui est dit avec au moins autant d’intensité que nous mettons à nous protéger de la façon dont cela est dit. Quand nous nous détournons de la colère, nous nous détournons de perceptions nouvelles, affirmant ainsi que nous acceptons les schémas préétablis, des schémas dont la familiarité nous est mortelle et sécurisante. J’ai essayé d’apprendre en quoi ma colère m’est utile, autant que ses limites.

Pour les femmes éduquées à avoir peur, trop souvent la colère est menaçante, destructrice. Dans la construction masculine de la force brutale, on nous a appris que nos vies dépendaient du bon vouloir du pouvoir patriarcal. Nous devions à tout prix éviter la colère des autres, car il n’y avait rien à en tirer hormis de la souffrance, on nous aurait cataloguées comme mauvaises filles, voire simples d’esprit, ne faisant pas ce qui était attendu de nous. Et si nous acceptons l’idée de notre impuissance, alors évidemment, n’importe quelle colère peut nous détruire.

Mais la force des femmes réside dans le fait de reconnaître que les différences qui existent entre nous sont constructives, de faire face à ces idées reçues dont nous avons hérité, malgré nous, et que nous devons changer maintenant. Les colères des femmes peuvent métamorphoser les différences en puissance. Parce que la colère entre personnes égales donne naissance au changement, pas à la destruction, et le malaise ou le sentiment de perte qu’elle provoque souvent n’est pas une fatalité, mais un signe de croissance.

Ma réponse au racisme est la colère. Cette colère a ouvert des abîmes dans ma vie uniquement lorsqu’elle était tue, inutile à quiconque. Elle m’a aussi servi dans des salles de classe sans lumière ni instruction, là où le travail et l’histoire des femmes Noires étaient moins que vapeur. Elle a été ma flamme dans l’étendue glaciale des regards ahuris lancés par des femmes blanches, des femmes qui voyaient uniquement dans mon expérience et dans l’expérience de mon peuple, de nouvelles raisons d’avoir peur ou de culpabiliser. Et n’utilisez pas ma colère comme excuse pour rester aveugles, ni pour vous dédouaner de la responsabilité de vos propres actions.

Quand les femmes de Couleur osent extérioriser la colère qui enserre trop de nos contacts avec les femmes blanches, on nous accuse souvent en disant que, je cite : « nous créons une atmosphère de désespoir », « nous empêchons les femmes blanches de surmonter leur culpabilité », ou encore « nous faisons obstacle à la communication confiante et à l’action ». Toutes ces citations sont directement tirées de lettres qui m’ont été adressées par des membres de cette organisation ces deux dernières années. Une femme m’a écrit : « Parce que vous êtes Noire et Lesbienne, vous semblez parler avec l’autorité morale de la souffrance. » Oui, je suis Noire et Lesbienne, et ce que vous entendez dans ma voix, c’est de la rage, pas de la souffrance. De la colère, pas de l’autorité morale. Il y a une différence.

Tourner le dos à la colère des femmes Noires, avec l’excuse ou le prétexte d’être intimidée, ne donne aucune force à quiconque - c’est uniquement une autre façon de préserver les oeillères raciales, le pouvoir des privilèges établis, intouchables, intacts. La culpabilité n’est qu’une autre façon de nous traiter en objet. On demande toujours aux peuples opprimés de tendre un peu plus la joue, de construire un pont entre aveuglement et humanité. On attend des femmes Noires qu’elles mettent leur colère au service exclusif du salut des autres, ou de leur information. Mais cette époque est révolue. Ma colère m’a été douloureuse, mais elle m’a aussi permis de survivre ; et avant de m’en défaire, je vais m’assurer que sur le chemin de la clarté, il existe au moins quelque chose d’aussi puissant pour la remplacer.

Quelle femme ici est si amoureuse de sa propre oppression au point qu’elle n’est plus capable de voir l’empreinte de son propre talon sur le visage d’une autre femme ? Quelle femme ici utilise sa propre oppression comme ticket d’entrée au rang des justes, loin des vents glacials de l’examen de conscience ?

Je suis une lesbienne de Couleur dont les enfants mangent régulièrement à leur faim parce que je travaille à l’université. Si leurs ventres pleins me font oublier mes points communs avec une femme de Couleur dont les enfants n’ont rien à manger parce qu’elle ne peut pas trouver de travail, ou qui n’a pas d’enfant parce que les avortements clandestins et la stérilisation ont bousillé ses organes génitaux ; si j’oublie la lesbienne qui choisit de ne pas avoir d’enfant, la femme qui reste dans le placard parce que sa communauté homophobe est son seul point d’ancrage, la femme qui choisit le silence plutôt qu’une autre forme de mort, la femme qui est terrifiée que ma colère ne déclenche la sienne ; si je manque de reconnaître toutes ces femmes comme d’autres facettes de moi-même, non seulement je participe à l’oppression de chacune d’entre elles, mais je participe aussi à la mienne ; et la colère qui se dresse entre nous doit être utilisée pour nous éclairer et nous renforcer mutuellement, et non pour fuir sous couvert de culpabilité ou pour creuser d’autres fossés. Je ne suis pas libre tant qu’une femme reste prisonnière, même si ses chaînes sont très. différentes des miennes. Et aussi longtemps qu’une personne de Couleur restera enchaînée, je ne serai pas libre. Ni aucune d’entre vous.

Je parle ici en tant que femme de Couleur déterminée, non pas à détruire, mais à survivre. Aucune femme ne peut endosser la responsabilité de changer le psychisme de son oppresseur, y compris quand ce psychisme s’incarne dans le corps d’une autre femme. J’ai léché les lèvres d’une louve, la colère, et je m’en suis servie pour illuminer, rire, protéger, mettre le feu en des lieux où il n’y avait ni lumière, ni nourriture, ni soeurs, en des lieux sans merci. Nous ne sommes pas des déesses, ni des matriarches, ni les édifices du pardon divin ; nous ne sommes pas les doigts de feu du jugement dernier, ni des instruments de flagellation ; nous sommes des femmes toujours obligées de nous interroger sur notre puissance de femmes. Nous avons appris à utiliser la colère comme on utilise la chair morte des animaux. Et blessées, maltraitées, en nous transformant, nous avons survécu et grandi, et selon les mots d’Angela Wilson, nous continuons notre chemin. Avec ou sans les femmes qui ne sont pas de Couleur. Nous utilisons toutes les forces pour lesquelles nous avons lutté, y compris la colère ; et cela afin de concevoir et de construire un monde où toutes nos soeurs pourront grandir, où nos enfants pourront aimer ; un monde où le pouvoir de toucher et de rencontrer la différence et les merveilles d’une autre femme transcendera finalement le besoin de destruction.

Car ce n’est pas la colère des femmes Noires qui se répand sur cette planète comme une eau souillée. Ce n’est pas ma colère qui lance des fusées, dépense plus de soixante mille dollars par seconde en missiles ou en autres engins de guerre et de mort ; ce n’est pas ma colère qui massacre les enfants dans les villes, entasse des gaz offensifs et des bombes chimiques, qui sodomise [7] nos filles et notre terre. Ce n’est pas la colère des femmes Noires qui se désagrège en un pouvoir aveugle, déshumanisant, qui nous détruira toutes si nous ne le combattons pas avec nos armes. C’est-à-dire notre puissance à analyser et à redéfinir les principes futurs de notre vie et de notre travail ; notre puissance à imaginer et à reconstruire, colère par douloureuse colère, pierre par lourde pierre, un futur où la différence sera féconde, et une terre qui soutiendra nos choix.

Nous ouvrons nos bras à toutes les femmes qui sont capables de nous rencontrer, face à face, par-delà la chosification et par-delà la culpabilité.

Cet article est extrait d’un recueil de textes paru aux éditions Mamamélis en 2003 : “Sister Outsider - essais et propos d’Audre Lorde sur la poésie, l’érotisme, le racisme, le sexisme...”.

Audre Lorde

P.S.

Audre Lorde (1934-1992) se définissait noire, lesbienne, féministe, mère, guerrière, poétesse, essayiste... Elle a prononcé ce discours lors de l’ouverture de la conférence de l’association nationale des études femmes à Storrs dans le Connecticut en juin 1981.

Quelques infos sur Audre Lorde et ses écrits :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Audre_Lorde

[1] Un poème extrait de la série Chosen Poems : Old and New, W. W Norton and Company, New York, 1978, p. 105-108

[2] N.d.t : bande dessinée américaine raciste, dans le style du personnage « Y’a bon Banania » imaginé en France.

[3] Titis Bridge Called My Back : Writings by Radical Women of Color, Cherrie Moraga et Gloria Anzaldua (éds), Kitchen Table : Women of Color Press, New York, 1984

[4] N.d.t : Femmes noires en faveur de la rémunération des travaux domestiques

[5] Extrait du poème « For Each of You », dans Chosen Poems : Old and New, op. cit.

[6] N.d.t : Droit de vote dans la constitution des États-Unis

[7] Remarque de DégenréE : Dans les rapports hétérosexuels, la sodomie est généralement l’expression de la domination sexuelle des hommes sur les femmes. Cependant certain-e-s déconstruisent cette pratique pour en faire un acte d’amour. Lorde emploie ici « sodomiser » afin d’exprimer la violence masculine. On peut se demander pourquoi elle a préféré ce verbe à celui de « violer »
Dernière modification par ftx le lun. nov. 04, 2013 3:38 pm, modifié 1 fois.
Norma
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Re: Supportez vous la racaille?

Message par Norma »

OFF-Topic :
[quote="mystic"]Ce sujet est bien trop important pour le limiter à ce petit forum, l'on m'a dit que vous aviez une vie en dehors de celui-ci, faudrait savoir. J'ai une vision macroscopique des choses, c'est le meilleur angle du vue pour comprendre un phénomène de société.

Peut-être devriez-vous vous documenter sur ce que racontent des politiciens, des sociologues souffrant d'angélisme, les think tanks ou le P.I.R. et consorts.

Quoi que je dise, vous le reprenez pour m'attaqué, pour me rabaisser, c'est lassant. Message compris. Ce n'est pas parce que vous ne me traiter pas de «sale arabe» que vous n'êtes pas raciste, comme expliqué dans ma présentation, certains d'entre-vous en ont le comportement. Je vous laisse donc entre être supérieurs à vous gargariser mutuellement de votre perfection cérébrale.[/quote]

Euh ... Pardon ?

Faudrait voir à se calmer là parce que tu nage en plein délire :blink:
T'interviens sur un topic on n'est pas d'accord avec toi alors on est cons, pas documentés, et racistes. C'est un peu facile, de s'arroger le droit de cracher sur tout le monde et de se draper de sa cape d'outragée dès que quelqu'un ne te brosse pas dans le sens du poil ..
Bref, moi je suis là pour discuter avec des gens, pas pour gérer les nerfs d'une paranoïaque, et cela qu'importe sa morphologie, dont sincèrement, je n'ai rien à branler.

Sinon FTX, tu vas vraiment nous copier-coller une page d'encyclopédie à chacun de tes messages ou tu vas comprendre qu'une intervention digeste vaut mieux que milles Universalis ?
ftx
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Re: Supportez vous la racaille?

Message par ftx »

désolé je trouvais trop précieux et intéressants ces textes pour les raccourcir :wink:

pas besoin de les lire d'un coup, je ne suis pas non plus un-e grand lecteur-trice :content:

ce qu'il est bien dans les forums c'est que ça reste affiché et on peut copier coller et y revenir
dessus sans tout tout lire à la fois!

j'espère qu'ils vous inspireront aussi :amour:
ftx
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Re: Supportez vous la racaille?

Message par ftx »

Audre Lorde est aussi une des rares personnes qui m'ont permis de comprendre des choses
importantes au sujet du racisme
avec des mots du coup simples :D

donc même si ça fait long ça se lit facilement :)

mon post sur Said Bouamama était
c'est vrai peut être un peu moins innaccessible :roll:

désolé encore et j'espère que malgré la longueur
vous pourrez aussi en apprécier comme même le contenu :amour:

parce qu'ils font partie des personnes qui ont fait bouger
des choses importantes en termes de réfléxions
et pas qu'à moi heureusement :content:
ftx
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Re: Supportez vous la racaille?

Message par ftx »

et voilà l'intérêt aussi de ces textes
était que précisement ne font pas partie d AUCUNE enciclopedia
mais des PERSONNES ENGAGEES dans la lutte contre le racisme
et oui y a une différence comme même :D

j'ai pensé que ces lectures pouvaient nous enrichir
sur des questionnements transversales à ce fil de discussion
qui semble prendre une tourné amère... :erm:

en tout cas merci de m'avoir permis de les partager avec vous :gentil:

et bon après midi :amour:
Dernière modification par ftx le lun. nov. 04, 2013 6:43 pm, modifié 1 fois.
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