Laissez-moi vous raconter une histoire...

[Jack Skellington]

Je ne savais pas quoi faire...à qui en parler...

A mes collègues, à mes amis? Je n'en sais rien, peut-être croiront-t'ils que je suis fou!

Puis je me suis dit que peut-être, ce serait bien que je raconte ceci sur ce forum...pourquoi pas? Peut-être que cette histoire en touchera plus d'un. J'ai quelque peu hésité, ne sachant pas où écrire, et sur quel topic...alors je crée un nouveau sujet ici, puisqu'aucun thème n'est imposé. (Et c'est mon premier!)
Toujours est-il que j'ai besoin de partager cette petite histoire...
Laissez-moi vous la conter s'il vous plaît...

Il y a encore quelques jours de cela, vivait encore le dernier couple de la maison de retraite où je travaille...
Mr et Mme C. étaient arrivés à un âge avancé (environ 90 ans). Ils ne partageaient pas la même chambre à cause de leur état de dépendance mais ils étaient placés côte à côte, sur le même palier...
Histoire banale me direz-vous, surtout en maison de retraite...c'est d'un commun!!!

C'est une histoire qui n'est pas si commune que cela bien au contraire. C'est un moment à partager, qui vous prend aux tripes, et qui vous transperce le coeur. Un moment rare et précieux...
Depuis 7 ans que je travaille en maison de retraite, je n'avais jamais été confronté à cela. Et pourtant...c'est arrivé à ce moment précis, comme pour me rappeler ce à quoi je croyais encore autrefois.... Je dois y croire de nouveau...

Ce couple, donc, est arrivé à la résidence il y a de cela quelques mois... Le mari ne faisait pas de sieste l'après-midi mais ne voulait jamais être séparé de sa femme...pour se faire, nous le laissions près d'elle, la regarder dormir. A l'époque, je n'y prêtais pas attention. C'est vrai! Vous pouvez voir et entendre tout dans ce genre d'endroit.
La maladie, la vieillesse, la mort nous côtoient chaque jour que Dieu fait! Mais il y a heureusement des moments de joies, de rires, et de tendresse qui me rappellent personnellement pourquoi je fais ce métier!
Ce monsieur était plus mal en point que sa femme qui marchait encore. Lui était (ce qu'on appelle) grabataire et dépendait de nous pour chaque geste de la vie quotidienne.
Même si sa femme ronchonnait sans cesse contre lui et son caractère dur comme du bois, elle s'inquiètait sans cesse et nous demandait toujours où il était s'ils étaient séparés...
Et que dire de leurs enfants qui leur rendaient visite dès qu'ils le pouvaient, une famille très unie autour d'eux (fait très rare en maison de retraite, que la maladie a tôt fait de saboter!!).

J'ai mis longtemps à comprendre ce qui les avait amenés ici, encore plus ce qui les unissait même à travers la maladie et la vieillesse...
Ce quelque chose à laquelle je ne croyais plus, cette force que même ici certains désapprouveront (les anti-niais)...cette chose rare qu'est l'amour...
Ce sentiment qui est capable d'unir 2 êtres dans la vie mais aussi dans la mort...

La Grande Faucheuse est venue prendre l'âme du monsieur sans crier gare, il y a de cela quelques jours...
La famille ne s'y attendait pas, et encore moins sa femme. Terrassée qu'elle était, je me souviens du jour de l'enterrement. Ses enfants tenaient à l'y emmener. Entourée de sa fille et de sa petite-fille, cette femme abattue et déboussolée m'a demandé d'un seul coup si je pouvais m'occuper de la cérémonie et prévenir tout le monde (ils étaient des gens très aimés et connaissaient beaucoup de monde m'avoua sa fille).
C'est à ce moment que je vis ce que mon coeur refusait de voir et s'évertuait à ne plus ressentir!!! ... C'est à ce moment que j'ai compris...

Cette brave femme qui aimait son mari de toute son âme, avait commencé à s'éteindre juste après lui avoir dit adieu...
Et c'est ce soir, à quelques jours d'intervalles, que leurs âmes unies par l'amour se sont rejointes dans l'éternité..........




Je ne sais pas si j'ai bien fait d'écrire tout cela mais pardonnez-moi si c'est trop triste, j'en avait grandement besoin...je ne pouvais pas garder cela pour moi...
Ce soir, je ne pleure pas, mais je sens l'espoir refleurir en moi... J'ai eu la preuve que l'amour existe encore et je sais au plus profond de mon âme que toutes et tous, nous y avons le droit...

[amélie-sens]

moi je trouve cela beau et rassurant (90 ans qd même) ...mais triste bien sûr!...Ca ne doit pas être facile de chaque jour cotoyer des gens en fin de vie...Bon courage à toi...

[zphyr]

C'est exactement ce qui est arrivé à mes grands-parents, mais dans l'ordre inverse : Ma grand-mère s'est éteinte comme tu le racontes pour le monsieur, et mon grand-père à 96 ans a dit : "Ah ? ben y'a plus qu'à partir, alors !" Ce qu'il a fait trois jours plus tard. Il est mort de rien, aucune pathologie.

Si mon compagnon décède avant moi et que je suis vieux (et mes enfants grands), j'aimerai pouvoir en faire autant...

[Points.de.suspension]

Oh...

Mon âme anti-niaise est émue. Si si. Les anti-niais ne sont pas (toujours) des vieux aigris, les anti-niais désapprouvent juste la niaiserie dégoulinante...

Et là, c'est tout le contraire. C'est la simplicité, c'est la douceur, c'est l'harmonie, c'est juste beau. (: Et ça fait plaisir, et donne de l'espoir, de voir que ça existe encore...

Non, je ne suis pas niaise, non.

[Iames]

Dur comme milieu la maison de retraite....

Elle est super belle (triste, mais belle) ton histoire.

Personnellement ça me réconforte de savoir qu'il existe quelque part des gens qui s'aiment pour le meilleurs et surtout pour le pire à cette époque ou tout est devenue consommable, même les êtres humains qui se prennent et se jette sans faire le moindre effort.

[spécimen]

J'ai froid et des frissons partout...

[Goldenvrack]

C'est mignon des petit vieux qui s'aiment encore.

Je ne suis pas niais!

[Viridis]

Je trouve cette histoire très belle

ça me fait penser à tristan et iseult 8)

[Adyton]

000

[anonymeB]

Tiens, je vais passer pour le méchant de service.

Je trouve ça débile. Comme s'ils allaient se rejoindre dans l'au-delà ou un truc comme ça. Ben non, ils sont morts, hein, je vois pas ce qu'il y a de beau, la mort les a séparé. Ils ne sont pas plus liés dans la mort ensemble que lorsqu'il n'y en avait qu'un seul qui était mort.

Ce n'est en rien une preuve d'amour, ou de romantisme, ou de fidélité. Ils sont juste... morts. Point.

J'sais pas, y'a peut-être quelque chose qui m'échappe, mais je suis complètement insensible à ça.