La viande de culture

Pour parler de tout et de rien, pas de thème imposé.
inconnu n

La viande de culture

Message par inconnu n »

Bonsoir.
En lisant cet article (que j'ai reçu en newsletter), j'ai été assez convaincu par le concept de la viande de culture, qui permettrait de reproduire a priori le même produit (au sens biologique et chimique) sans tuer d'animaux.

Par contre, j'ai lu pas mal de commentaires hostiles (et même le ton de l'article l'était un peu), arguant que "c'est comme dans Soleil Vert" ou "1984", que c'est "pas naturel", que ça "risque de créer des dérives", que c'est "encore un moyen de plus de faire du profit et qu'on devrait plutôt réduire la consommation de viande par personne, et le gâchis"... Bon, j'ai trouvé les arguments des contre assez irrationnels ou du moins très légers, mais j'aimerais bien voir des avis de gens hostiles plus élaborés. Or, EA étant un "laboratoire d'idées" (comme le disait Norma, j'aime bien la formule), j'en profite donc.
Nouveau : la viande de culture
Chère lectrice, cher lecteur,

Sans doute ai-je été repéré car je reçois maintenant gratuitement, et sans les avoir demandés, des magazines destinés aux professionnels de l'industrie agro-alimentaire.

Je pense qu'ils espèrent que je parlerai à mes lecteurs de leurs nouvelles innovations. Ils ne vont pas être déçus.

Dans le dernier numéro de « The World of Food Ingredients », une revue professionnelle qui se présente comme le « leader en nutrition », et qui coûte 25 euros par numéro (!), je lis page 15 qu'a été servi pour la première fois en août 2013, dans un salon à Londres, un hamburger contenant un steak intégralement constitué de viande de culture. Selon l'auteur de l'article, Henk Hoogenkamp, expert mondialement connu des protéines et doctorant en biomatériaux et médecine régénérative, il s'agit du prélude à une révolution alimentaire planétaire.

La technologie consiste à prélever sur un animal des cellules souches de muscle et à les faire se reproduire dans un bain de nutriments, en laboratoire. Le résultat est « étonnamment semblable à de la viande d'animal », explique Henk Hoogenkamp.

Le problème, toutefois, est qu'il sera sans doute difficile de convaincre les gens de consommer de la viande ayant poussé en usine. Mais Henk Hoogenkamp a la solution :

« Le problème de l'acceptation de la viande de culture par les consommateurs est presque plus important que les problèmes technologiques. Il sera essentiel de combiner le bœuf de culture avec d'autres tissus animaux comme la graisse, les tissus conjonctifs, et le sang. La couleur rouge de la viande est due à l'hémoglobine. Il est possible d'ajouter à la viande de culture du colorant naturel d'hémoglobine, que l'on trouve dans le commerce, et qui est issue de globules rouges. Mais dans le futur, il sera possible aussi de produire des globules rouges en laboratoire, ce qui éliminera le besoin en sang animal. »


Idem pour la graisse et les autres tissus. Mais ce n'est pas tout. Henk Hoogenkamp explique ensuite que, aussi intéressant voire plus que la viande de culture, il est possible d'élever des insectes de façon industrielle pour fournir les protéines nécessaires à l'alimentation humaine. La solution, pour les rendre consommables, sera de mélanger ces protéines d'insectes à des substances végétales : Le potentiel des protéines d'insectes

« Les protéines d'insectes sont de haute qualité et peuvent aussi être arrangées pour mimer les tissus animaux. De plus, des hydrolysas de protéines d'insectes peuvent être ajoutées aux protéines végétales pour les compléter en acides aminés essentiels. Après les bactéries et les champignons, les insectes comptent parmi les organismes les plus efficients de la planète, ayant besoin de peu d'énergie et de nourriture pour se développer. Les connaissances et technologies nécessaires aux cultures d'insectes sont bien maîtrisées, et offrent des avantages comparables à celles de la viande de culture. »


Et le pire – le pire, cher lecteur – c'est que, après avoir lu cet article en entier, je suis absolument convaincu que l'humanité se nourrira effectivement de protéines d'insectes et de viande de culture d'ici quinze ans au plus tard. Peut-être pas vous et moi, mais certainement nos collègues, nos amis, et peut-être même nos enfants et notre entourage proche.

Voici pourquoi :

Henk Hoogenkamp explique qu'un seul prélèvement de cellules souches, sur un seul animal, pourrait permettre de produire 20 000 tonnes de bœuf de culture, autrement dit 175 millions de hamburgers.

Il explique que plus de 50 % de la production de viande de bœuf actuelle étant consommée hachée, dans des hamburgers ou des plats préparés, il n'y a aucune raison objective de continuer à la produire de façon coûteuse, avec des animaux vivants.

La viande de culture est aussi, selon lui, plus saine puisqu'elle ne risque pas d'être infectée par la salmonelle, l'E. Coli ou la maladie de la vache folle. Sa consommation réduirait donc le risque pour l'être humain de cancer, de maladies cardiovasculaires, et de diabète.

Il démontre ensuite que la viande de culture est nettement plus écologique que la viande d'élevage : produire un kilo de viande nécessite 9 kilogrammes de nourriture et 2 000 litres d'eau, et l'élevage occupe 70 % des terres agricoles, en pâturages ou en production de nourriture pour le bétail.

« Le bœuf de culture pourrait réduire les besoins en terre agricole et l'élevage en batterie. (…) Il réduit aussi l'émission de méthane et de gaz à effets de serre. »

« La production de viande in vitro utilisant des cellules souches, aussi appelée viande de culture, est possiblement une alternative écologique et durable aux cycles de croissance inefficaces du bétail », conclut-il. (la suite ci-dessous)

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Bonne nouvelle pour les végétariens ?
Je doute que la viande de culture soit une bonne nouvelle pour les végétariens. En revanche les résultats d'une étude sur 73 000 personnes parue en 2013 révèle une nette diminution de la mortalité chez les végétariens. Comme le note Julien Venesson dans le numéro du mois d'octobre d'Alternatif Bien-Être, cette étude prouve de manière formelle que l'alimentation végétarienne n'est pas inférieure à l'alimentation omnivore... à condition, bien sûr, de savoir éviter les pièges et les carences.

A votre santé !
popy
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Re: La viande de culture

Message par popy »

Perplexe...

- Ils arrivent deja à créer des aliments 100% végétales qui imite la saveur de la viande.
Cest moins chelou et c'est meilleur.

Mais bon, apparement, ya un marché à prendre.
Tant mieux si ça roule pour eux.
irvel
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Re: La viande de culture

Message par irvel »

N.S. a écrit :50 % de la production de viande de bœuf actuelle étant consommée hachée, dans des hamburgers ou des plats préparés, il n'y a aucune raison objective de continuer à la produire de façon coûteuse, avec des animaux vivants.
J'avais lu un article sur la viande de synthèse il y a quelques mois, le steak de démo avait coûté une fortune, c'est encore expérimental, pour passer en production il faudrait baisser énormément les coûts.
L'argument sur les 50 % de viande hachées ou autre est foireux, cette viande est principalement constituée de déchets que les bouchers traditionnels jetaient ou donnaient aux animaux, sont coût est très bas.

Pour que cette viande ait du succès il faudrait que son goût soit satisfaisant et que sa valeur nutritive soit avérée, ceci pour un prix significativement plus bas. Peut être en arriverons nous à ce type de production, mais je doute que ce genre de chose résolve les problèmes de surpopulation ou autres.

Il serait très simple de diminuer très vite notre consommation excessive de viande, notre santé ne s'en porterait que mieux … ceci sans devenir végétarien pour autant, la "diminution de la mortalité" de ceux ci me laisse sceptique.
inconnu n

Re: La viande de culture

Message par inconnu n »

popy a écrit :Perplexe...

- Ils arrivent deja à créer des aliments 100% végétales qui imite la saveur de la viande.
Cest moins chelou et c'est meilleur.

Mais bon, apparement, ya un marché à prendre.
Tant mieux si ça roule pour eux.
Oui le simili-carné imite la saveur, mais là le but est de créer de la vraie viande, ce qui du coup permet le même apport nutritionnel en plus du goût.

Sinon, honnêtement, je n'arrive pas à comprendre ce qui coûte aussi cher dans la production aujourd'hui. Pas pour dire que "c'est abusé" ou critiquer, hein, juste que moi je connais pas assez la matière pour comprendre les coûts.
Nomade
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Re: La viande de culture

Message par Nomade »

Moui.
A titre personnel, je suis assez horrifié par cette évolution scientifique, aussi bien en tant que consommateur qu'en tant qu'"individu travaillant pour une filière animale".

En tant que consommateur, déjà, et même plus précisément en tant que consommateur français. Les Etats-Unis (et le Royaume-Uni, entre autres, sans doute) ont déjà depuis longtemps sacrifié totalement la notion de goût sur l'autel de la productivité, mais il existe encore des pays où on aime manger, et où on aime les saveurs. La France en fait partie, et même si j'en mange une fois tous les 36 du mois, ça me ferait vraiment chier de voir disparaître les races bovines à viande qui, quand tu en manges un bout, te font penser "C'est bon, je peux mourir heureux maintenant". Je ne suis pas du tout persuadé que de la viande "élevée en laboratoire" puisse s'approcher gustativement d'une entrecôte d'Aubrac.

D'un point de vue "carnivore", ça me choque assez de dire "Oh la la l'élevage c'est mal, on va plutôt passer par les cellules souches". Pour moi, soit on assume la "cruauté" de l'élevage/abattage (et on essaie de l'améliorer), soit on n'assume pas et on devient végétarien. La troisième voie du "on va faire un truc qui ressemble à de la viande parce que quand même on aime ça mais qu'on est trop hypocrite pour accepter d'où elle vient" me semble carrément glauque (en même temps je n'arrive déjà pas à comprendre le principe du "steak" de soja, qui consiste à "faire comme si", la bonne conscience en plus).

Côté environnement, maintenant. Ouais, une vache ça rote et ça pète. Sauf que ça a aussi une utilité, dans des systèmes moyennement intensifs. Si on supprime tout l'élevage, on supprime aussi tous les engrais organiques produits par l'élevage, qui permettent de se passer des engrais minéraux (ceux-ci étant beaucoup plus polluants, parce que moins retenus par les sols et moins bien assimilés par les plantes). Ce qu'on gagnerait en pollution atmosphérique, on le perd (je ne sais pas si c'est équivalent, j'ai pas fait de bibliographie) en pollution des sols et de l'eau. On a des problèmes actuellement avec des élevages trop nombreux dans certaines zones (Bretagne et algues vertes, tout ça), et des rééquilibrages doivent avoir lieu, mais une disparition complète des animaux aurait un impact assez dramatique sur les rendements des cultures au niveau mondial, à moyen terme.
Côté paysage, on a tendance à oublier que l'élevage jour un rôle primordial : si la Normandie et la Bourgogne, c'est joli, c'est en grande partie parce qu'on y trouve des vaches, donc des pâturages, donc des clôtures, donc des haies, donc une biodiversité associée à ces paysages. Supprimons les vaches, et on a la Beauce, sublime territoire sans limites et sans aucune forme de vie animale (bon, j'exagère, il reste les ravageurs des cultures et leurs quelques prédateurs, quand ils trouvent encore des endroits où nicher). Quand aux montagnes, sans animaux, elles ne seront tout simplement plus entretenues. Alors après, ouais, la disparition des vaches américaines élevées en parc ou des cochons et poulets de partout élevés en bâtiments n'aura pas un gros impact sur le paysage.
Côté emploi, bon, je pense qu'il est assez clair que ça aurait des conséquences importantes avec la disparition de tout ce qui sert à produire de la viande aujourd'hui (éleveurs, abattoirs, mais aussi fabricants d'aliment).
Et enfin d'un point de vue "équilibre matière", on aurait aussi un souci. La plupart des productions végétales occasionnent la production de co-produits : du blé, on mange le grain, on laisse le son ; de la betterave, on tire du sucre, il reste de la pulpe ; du colza, on tire de l'huile, il reste des tourteaux, et j'en passe. La grande majorité de ces co-produits sont actuellement utilisés dans l'alimentation animale, ce qui permet de trouver un débouché à quasiment tout le végétal qu'on produit. Supprimons l'élevage et tous ces co-produits deviendront inutiles (à moins qu'on les brûle pour en tirer de l'énergie). Inutile, donc non rémunérateurs. Donc les producteurs devront se rémunérer seulement sur la partie de leurs végétaux qui est consommable par l'homme. Pour exemple, le tournesol donne 50 % d'huile et 50 % de tourteaux. Si on supprime le revenu généré par les tourteaux, ça fait mécaniquement exploser le prix de l'huile (pas de 50 % parce que les deux produits n'ont pas le même prix de base, mais en gros de 30 %).

En gros, pour moi, la fin de l'élevage, c'est :
- la destruction des paysages et de la biodiversité qu'elle abrite (dans les zones où l'élevage est encore à taille humaine, j'exclus donc le Brésil, les Etats-Unis et dans une moindre mesure le Nord de l'Europe)
- le renchérissement du prix des produits de consommation humaine issus des céréales (valorisation partielle + pertes de rendements en raison de l'érosion des sols)
- la fin de la gastronomie dans tous les pays qui en ont une (putain, le jambon espagnol, quoi ! :ninja: ).

Donc ouais, pour faire bouffer de la merde aux Américains (qui y sont habitués) et mettre fin à leurs élevages intensifs, la viande in vitro est une solution. Ailleurs dans le monde, ça me paraît hyper dangereux.

Pour répondre sur le coût, je pense que c'est surtout parce que c'est encore expérimental qu'il est aussi élevé. On doit pouvoir le faire baisser de manière très nette en passant à une échelle industrielle, une fois que les process de fabrication seront calés.
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yellowthing
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Re: La viande de culture

Message par yellowthing »

Bah où est le plaisir si on abat pas les bêtes pour les bouffer?

Cela dit j'ai rien contre l'idée (même si je suis persuadé que ça doit avoir un goût passablement immonde) vu que de toute façon même si ça se développe, la production à échelle industrielle coûtera un max et ne pourra pas égaler les coûts d'un élevage traditionnel, sans compter les réticences auprès des consommateurs, bref ça ne remplacera pas l'élevage, se sera un production parallèle je doute qu'il y'ait le moindre effet sur l'utilisation du nombre de terre agricole pour le bétail (le nombre d'êtres humains ne cesse d'augmenter et qu'il y'a de plus en plus de bouches à nourrir - ils se multiplient comme des lapins).

Faut pas oublier que nombre d'espèces, races, bovines et autres, ne vivent que parce qu'on les élève si on arrête leur élevage elles finiront bien vite par disparaître.

Cela dit je suis persuadé que dans les années à venir, 15 ans, 20 ans, 40 ans on vivra une révolution de notre alimentation, et dans la production alimentaire mais je crois pas qu'la viande de labo ferra partie de ces "solutions d'avenir".

A vos insectes et bon appétit.
Je ne suis pas là, vous ne me voyez pas, ce n'est qu'une illusion. Rendormez-vous.
inconnu n

Re: La viande de culture

Message par inconnu n »

Nomade : Oui mais en quoi c'est glauque. Et surtout, en quoi ce serait pire de manger de la viande qui n'a fait souffrir aucun animal, plutôt que faire souffrir de la viande qui a tué des animaux ?
C'est pas un peu irrationnel, le "je suis contre parce que je trouve ça glauque" ?

Et tant qu'on y est, en quoi le steak de soja c'est de la "bonne conscience" (sous-entendu, mal placée ?), puisque ça ne tue effectivement pas d'animal tout en gardant certaines sensations similaires ?
D'ailleurs il y a rien de mal à vouloir avoir bonne conscience. Ce qui est mal, c'est de vouloir se donner bonne conscience de manière hypocrite.

Niveau gustatif, je ne sais pas. Ceci dit, je rappelle tout de même que ce serait exactement la même matière. Ce serait pas de la "fausse" viande, mais bien de la viande réelle. Fabriquée à partir de cellules-souches, certes, mais la viande dans le corps de l'animal vient de cellules-souches aussi, hein.

Niveau environnement, en fait, on parle de l'impact de l'élevage dans la mesure où la majorité des terres, dans le monde, sert à produire de la nourriture pour les animaux d'élevage (plus les terres pour l'élevage lui-même et la culture pour les humains), aux dépens des forêts par exemple. Le mot "environnement" signifiait "impact écologique", pas "beauté".

Après pour la beauté des paysages (ce qui au passage, n'a rien à voir avec l'écologie), tout dépend de ce qu'on en fait. Et même si on abandonnait des terrains, la Nature a t-elle vraiment besoin de la main humaine pour l'entretenir, afin d'être belle (il y avait de la biodiversité bien avant l'élevage) ? D'autant plus que la beauté, c'est subjectif, donc bon, l'argument de "à la place de la Normandie on aura la Beauce, et ce serait pas beau", c'est quand même un peu glissant.

Ensuite, d'un point de vue franco-français évidemment ton point de vue se défend mais comme tu le dis toi-même, au niveau mondial, c'est pas le cas aux USA, au Brésil et au nord de l'Europe, ce qui au total est bien plus lourd en termes de production et de consommation que la France.

Merci en tout cas de ta réponse, je comprends un peu mieux les raisons de l'hostilité.
sampa
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Re: La viande de culture

Message par sampa »

N.S. a écrit :Et tant qu'on y est, en quoi le steak de soja c'est de la "bonne conscience" (sous-entendu, mal placée ?), puisque ça ne tue effectivement pas d'animal tout en gardant certaines sensations similaires ?
Tout le problème est là pour moi. Je préfère un vrai steak de bœuf. Ça ne me donne pas envie de manger quand je vois un steak de soja. C'est tout. Tout comme je n'aurais pas spécialement envie de manger un aliment bleu. Pour que je puisse manger quelque chose, il faut pour moi que ce soit un minimum appétissant visuellement.
C'est peut-être bête mais c'est comme ça.
N.S. a écrit :la majorité des terres, dans le monde, sert à produire de la nourriture pour les animaux d'élevage (plus les terres pour l'élevage lui-même et la culture pour les humains), aux dépens des forêts par exemple. Le mot "environnement" signifiait "impact écologique", pas "beauté".
Tu sors ça d'où? Ça m'intéresse (c'est sans aucune ironie ou jugement).

Et pour parler du cas du Brésil, oui l'élevage bovin a été responsable en partie de la déforestation d'une partie de l'Amazonie lorsque les terres intérieures (l'élevage était plutôt situé dans le sud du pays et sur la côte atlantique il y a 30 ans) plus intéressantes même si difficile d'accès ont été investies. Seulement aujourd'hui la déforestation est dénoncée surtout parce que les terrains déboisés sont utilisés pour en faire des pâturages pour les bovins. Et le comble, elle est dénoncée aussi parce que ces terres servent à l'agriculture intensive .... du soja.
Nomade
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Re: La viande de culture

Message par Nomade »

N.S. a écrit :Nomade : Oui mais en quoi c'est glauque. Et surtout, en quoi ce serait pire de manger de la viande qui n'a fait souffrir aucun animal, plutôt que faire souffrir de la viande qui a tué des animaux ?
C'est pas un peu irrationnel, le "je suis contre parce que je trouve ça glauque" ?
C'est totalement irrationnel, et j'assume. Utiliser la science pour contourner la vie, ça me choque. Bon, là on va me sortir "oui mais la PMA c'est aussi un contournement des voies impénétrables du Seigneur blabla" et la grande différence selon moi, c'est que dans le cas de la viande on PEUT faire sans.
J'ai envie d'être conscient que la viande que j'ai dans mon assiette provient d'un animal. Je ne sais pas pourquoi, je me rends compte que ça n'a pas de sens, mais c'est viscéral. Je suis à contrecourant d'un nombre croissant des Occidentaux sur ce plan-là, mais pour moi c'est important. Je suis incapable de tuer ma viande, mais je veux savoir comment elle est produite, je sais ce qu'est un abattoir et comment il travaille, je connais aussi les règlementations et les recherches qui ont pour but d'améliorer les choses, et ça me convient. Ça n'a rien de choquant pour moi de manger des animaux qui ont été tués. Par contre, manger un truc qui sort d'une éprouvette, je ne suis pas psychologiquement prêt à l'admettre.

Je vais tenter d'expliquer plus clairement ce qui m'énerve dans le concept du steak de soja. C'est assez simple, en fait. Si tu ne manges pas de viande (qu'elle qu'en soit la raison, et il y en a plein de bonnes), pour moi c'est hypocrite de vouloir en imiter l'aspect, le nom, le goût ou l'odeur. Tu assumes tes choix et tu manges autre chose. Pas un steak de soja. Un cube de soja. Je ne fume pas, je ne vais pas me mettre à sucer un stylo pour faire semblant "parce que j'aimerais bien mais j'peux point", je mange du chocolat à la place (je m'auto-attribue la palme de la comparaison la plus pourrie de l'année :mrgreen: ).
Niveau gustatif, je ne sais pas. Ceci dit, je rappelle tout de même que ce serait exactement la même matière. Ce serait pas de la "fausse" viande, mais bien de la viande réelle. Fabriquée à partir de cellules-souches, certes, mais la viande dans le corps de l'animal vient de cellules-souches aussi, hein.
Le goût d'une viande (ou d'un lait, ou d'un légume) dépend de son patrimoine génétique (et là déjà, permets-moi de douter que ce soit le patrimoine génétique des races à viande françaises qui soit choisi pour faire de la viande de synthèse) mais aussi de ce qu'elle mange (la composition de son fourrage/pâturage, qui varie selon les régions, les conditions climatiques, les sols : c'est le concept de "terroir"). Il me paraît fortement improbable (j'ai envie de dire "strictement impossible", mais je ne sais pas) qu'une viande élevée à l'herbe normande ait la même qualité gustative qu'une viande produite à base d'acides aminés injectés dans une boîte de Pétri.
Niveau environnement, en fait, on parle de l'impact de l'élevage dans la mesure où la majorité des terres, dans le monde, sert à produire de la nourriture pour les animaux d'élevage (plus les terres pour l'élevage lui-même et la culture pour les humains), aux dépens des forêts par exemple. Le mot "environnement" signifiait "impact écologique", pas "beauté".
Oui, et dans "impact écologique", l'érosion des sols en raison de l'utilisation d'engrais minéraux et la perte de rendements en raison de l'érosion des sols, ça ne te suffit pas ? :-P
Après pour la beauté des paysages (ce qui au passage, n'a rien à voir avec l'écologie), tout dépend de ce qu'on en fait. Et même si on abandonnait des terrains, la Nature a t-elle vraiment besoin de la main humaine pour l'entretenir, afin d'être belle (il y avait de la biodiversité bien avant l'élevage) ? D'autant plus que la beauté, c'est subjectif, donc bon, l'argument de "à la place de la Normandie on aura la Beauce, et ce serait pas beau", c'est quand même un peu glissant.
La Nature n'existe pas. Ça fait environ 5000 ans que l'homme la transforme, directement ou indirectement. Les terres laissées libres par l'élevage ne seraient pas abandonnées longtemps, justement pour compenser la dégradation progressive des sols : on aurait besoin de davantage de surfaces (puisqu'elle seraient moins productives) pour produire autant (voire plus, hein, parce que si on ne mange plus de viande il faudra bien manger autre chose à la place). Donc retournement des prairies et disparition de la biodiversité qu'elles hébergent.
Quant au paysage, ils font partie non seulement du patrimoine écologique et culturel, mais aussi de l'économie d'une région, via notamment le tourisme.
Ensuite, d'un point de vue franco-français évidemment ton point de vue se défend mais comme tu le dis toi-même, au niveau mondial, c'est pas le cas aux USA, au Brésil et au nord de l'Europe, ce qui au total est bien plus lourd en termes de production et de consommation que la France.
Pardon, je n'étais pas au courant que "les USA, le Brésil et le Nord de l'Europe", c'était le monde. Les productions animales sont une source de richesse importante pour les familles rurales des pays pauvres (si tu as deux vaches au Cambodge, tu es considéré comme riche (à la campagne, hein, à Phnom Penh t'es juste considéré comme un bouseux) ; si tu as des poules, les œufs peuvent t'apporter un complément de revenu, ou te permettre de nourrir ta famille ; si tu as un cochon, tu es le roi des jours de fête) ; elles fertilisent les terres, ce qui garantit l'abondance des récoltes ; elles se nourrissent des déchets verts des foyers ou de ce qu'elles trouvent autour des habitations et ne coûtent rien (je parle toujours du cas des pays en développement).

D'un point de vue mondial et sur les plans économique, culturel et social, les productions animales sont importantes. D'un point de vue écologique, elles ont un impact non négligeable, à la fois positif et négatif. Qu'on veuille réduire les volumes, ça me paraît recevable, notamment dans les pays riches qui ont une consommation qui met en péril la santé de leurs citoyens, l'environnement dans certaines zones de production et l'économie des pays plus fragiles. Mais passer au "tout synthétique", c'est une aberration agronomique et (à mon avis) culturelle, sociale et économique.
Nomade
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Re: La viande de culture

Message par Nomade »

C'est vrai que les surfaces consacrées à l'élevage sont sans commune mesure avec celles consacrées aux cultures (je suis sur le site de la FAO mais ça bugue >_< ). Il faut quand même être conscient que l'élevage, dans le monde, s'est développé surtout là où les cultures n'étaient pas possibles, ou pas rentables (la pampa argentine, le Sahel, les steppes mongoles, les zones montagneuses...). Et ces zones-là, même si tu en vires les animaux, tu n'en feras rien. Et elles sont du genre vaste, ce qui pèse sur les statistiques mondiales. Faudrait que je regarde pour la France ou l'Europe.
Par contre, la plupart des plantes cultivées par l'homme (pâturages destinées au fourrage exceptés) ont une double utilité : alimentation humaine et animale (voire industrie humaine et alimentation animale).
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