En lisant cet article (que j'ai reçu en newsletter), j'ai été assez convaincu par le concept de la viande de culture, qui permettrait de reproduire a priori le même produit (au sens biologique et chimique) sans tuer d'animaux.
Par contre, j'ai lu pas mal de commentaires hostiles (et même le ton de l'article l'était un peu), arguant que "c'est comme dans Soleil Vert" ou "1984", que c'est "pas naturel", que ça "risque de créer des dérives", que c'est "encore un moyen de plus de faire du profit et qu'on devrait plutôt réduire la consommation de viande par personne, et le gâchis"... Bon, j'ai trouvé les arguments des contre assez irrationnels ou du moins très légers, mais j'aimerais bien voir des avis de gens hostiles plus élaborés. Or, EA étant un "laboratoire d'idées" (comme le disait Norma, j'aime bien la formule), j'en profite donc.
Nouveau : la viande de culture
Chère lectrice, cher lecteur,
Sans doute ai-je été repéré car je reçois maintenant gratuitement, et sans les avoir demandés, des magazines destinés aux professionnels de l'industrie agro-alimentaire.
Je pense qu'ils espèrent que je parlerai à mes lecteurs de leurs nouvelles innovations. Ils ne vont pas être déçus.
Dans le dernier numéro de « The World of Food Ingredients », une revue professionnelle qui se présente comme le « leader en nutrition », et qui coûte 25 euros par numéro (!), je lis page 15 qu'a été servi pour la première fois en août 2013, dans un salon à Londres, un hamburger contenant un steak intégralement constitué de viande de culture. Selon l'auteur de l'article, Henk Hoogenkamp, expert mondialement connu des protéines et doctorant en biomatériaux et médecine régénérative, il s'agit du prélude à une révolution alimentaire planétaire.
La technologie consiste à prélever sur un animal des cellules souches de muscle et à les faire se reproduire dans un bain de nutriments, en laboratoire. Le résultat est « étonnamment semblable à de la viande d'animal », explique Henk Hoogenkamp.
Le problème, toutefois, est qu'il sera sans doute difficile de convaincre les gens de consommer de la viande ayant poussé en usine. Mais Henk Hoogenkamp a la solution :
« Le problème de l'acceptation de la viande de culture par les consommateurs est presque plus important que les problèmes technologiques. Il sera essentiel de combiner le bœuf de culture avec d'autres tissus animaux comme la graisse, les tissus conjonctifs, et le sang. La couleur rouge de la viande est due à l'hémoglobine. Il est possible d'ajouter à la viande de culture du colorant naturel d'hémoglobine, que l'on trouve dans le commerce, et qui est issue de globules rouges. Mais dans le futur, il sera possible aussi de produire des globules rouges en laboratoire, ce qui éliminera le besoin en sang animal. »
Idem pour la graisse et les autres tissus. Mais ce n'est pas tout. Henk Hoogenkamp explique ensuite que, aussi intéressant voire plus que la viande de culture, il est possible d'élever des insectes de façon industrielle pour fournir les protéines nécessaires à l'alimentation humaine. La solution, pour les rendre consommables, sera de mélanger ces protéines d'insectes à des substances végétales : Le potentiel des protéines d'insectes
« Les protéines d'insectes sont de haute qualité et peuvent aussi être arrangées pour mimer les tissus animaux. De plus, des hydrolysas de protéines d'insectes peuvent être ajoutées aux protéines végétales pour les compléter en acides aminés essentiels. Après les bactéries et les champignons, les insectes comptent parmi les organismes les plus efficients de la planète, ayant besoin de peu d'énergie et de nourriture pour se développer. Les connaissances et technologies nécessaires aux cultures d'insectes sont bien maîtrisées, et offrent des avantages comparables à celles de la viande de culture. »
Et le pire – le pire, cher lecteur – c'est que, après avoir lu cet article en entier, je suis absolument convaincu que l'humanité se nourrira effectivement de protéines d'insectes et de viande de culture d'ici quinze ans au plus tard. Peut-être pas vous et moi, mais certainement nos collègues, nos amis, et peut-être même nos enfants et notre entourage proche.
Voici pourquoi :
Henk Hoogenkamp explique qu'un seul prélèvement de cellules souches, sur un seul animal, pourrait permettre de produire 20 000 tonnes de bœuf de culture, autrement dit 175 millions de hamburgers.
Il explique que plus de 50 % de la production de viande de bœuf actuelle étant consommée hachée, dans des hamburgers ou des plats préparés, il n'y a aucune raison objective de continuer à la produire de façon coûteuse, avec des animaux vivants.
La viande de culture est aussi, selon lui, plus saine puisqu'elle ne risque pas d'être infectée par la salmonelle, l'E. Coli ou la maladie de la vache folle. Sa consommation réduirait donc le risque pour l'être humain de cancer, de maladies cardiovasculaires, et de diabète.
Il démontre ensuite que la viande de culture est nettement plus écologique que la viande d'élevage : produire un kilo de viande nécessite 9 kilogrammes de nourriture et 2 000 litres d'eau, et l'élevage occupe 70 % des terres agricoles, en pâturages ou en production de nourriture pour le bétail.
« Le bœuf de culture pourrait réduire les besoins en terre agricole et l'élevage en batterie. (…) Il réduit aussi l'émission de méthane et de gaz à effets de serre. »
« La production de viande in vitro utilisant des cellules souches, aussi appelée viande de culture, est possiblement une alternative écologique et durable aux cycles de croissance inefficaces du bétail », conclut-il. (la suite ci-dessous)
Annonce spéciale
Bonne nouvelle pour les végétariens ?
Je doute que la viande de culture soit une bonne nouvelle pour les végétariens. En revanche les résultats d'une étude sur 73 000 personnes parue en 2013 révèle une nette diminution de la mortalité chez les végétariens. Comme le note Julien Venesson dans le numéro du mois d'octobre d'Alternatif Bien-Être, cette étude prouve de manière formelle que l'alimentation végétarienne n'est pas inférieure à l'alimentation omnivore... à condition, bien sûr, de savoir éviter les pièges et les carences.
A votre santé !