otsoa a écrit :Je fais une petite enquête sur harcèlement scolaire, mais j’aimerais en discuter avec vous?
qu’en pensez vous? En avez vous subi ? Comment ca c’est passé?
Moi j’en est subi de ma 6e a ma term mais au debut c'était pas vis a vis de l’homosexualité mais apres ca a changé. ...
J'ai connu le harcèlement scolaire, mais pas en rapport avec mon homosexualité.
Et je suis vraiment contente de voir que c'est quelque chose qui "bouge" (un peu) de nos jours.
J'ai aussi encore beaucoup de mal à "pardonner" les adultes. Des surveillants qui au lieu de m'aider se moquaient de moi (il y a eu ce jour une surveillante devait venir témoigner devant un enième conseil "spécial Kennedy" au collège parce qu'elle était présente lorsque je m'étais fait agresser une fois de plus. Elle a dit "moi, je sais pas, j'ai rien vu O_O , d'ailleurs j'ai vu Kennedy les gifler avant (ça me serait même pas venu à l'idée de lever la main sur qui que ce soit)". Ce jour-là je me suis sentie très très seule et ça m'a confortée dans l'idée que je serais jamais comme les autres et que ça s'arrangerait jamais).
Pour moi ça avait commencé tôt, au primaire. Je me suis donc très tôt inculqué toute seule dans ma tête que j'étais inférieure aux autres, que les autres savaient mieux que moi comment je devais me comporter, qu'il était normal qu'ils me jugent et que ça transparaissait de mon visage que j'étais nulle. Donc, même face à des gens nouveaux, je savais pas me comporter "normalement", je me mettais inconsciemment en position de future victime... quand on m'a changée d'école, bah j'ai de nouveau été le bouc émissaire. Mes parents en ont conclu qu'effectivement, le problème c'était moi. Et moi aussi, je l'ai cru. Tout comme j'ai cru les responsables, au collège, qui m'expliquaient que le problème c'était moi.
C'est difficile d'imaginer l'enfer que c'est, mais faut bien comprendre que c'est continuel (encore pire maintenant avec les réseaux sociaux je suppose), l'école occupe une grande place dans la vie d'un enfant scolarisé. Jamais de répit. En classe (les boulettes de papier, l'encre noire qui fout en l'air les vêtements, les coups de pied), à la cantine (le plateau qui tombe, l'assiette cassée, la nourriture qui vole dans les cheveux), dans la cour (les insultes, le goûter volé, le tirage de cheveux, les bousculades)... Et en dehors, je pouvais rien faire tranquillement, même pas aller à la fête foraine sans croiser un gamin qui allait se moquer de moi (alors que souvent, moi, je le connaissais même pas, mais TOUT le monde dans l'école me connaissait, savait que le jouet de l'école, le gamin dont on pouvait se moquer c'était moi, avait entendu des trucs sur moi "salut dis il paraît que tu manges de la colle et que tes parents vivent dans une grotte ?"), pas de bouton "pause". Et tout ça à un âge où on se construit psychologiquement...
Ma solution, probablement très mauvaise, a été d'être absente le plus souvent possible. J'avais une petite santé, alors ça aidait. Dès que j'étais malade, j'en rajoutais une couche, et c'était bon : tranquille un bon moment sans l'école. D'ailleurs, j'ai souvent eu de nouveaux carnets de liaison car il n'y avait plus de bulletins d'absence. Au lycée, j'ai carrément laissé tomber, pas eu le courage d'aller jusqu'au bout, en plus je commençais à plus rien comprendre à force d'être absente. Après un n-ième moment difficile, en tout début de 1re, j'ai demandé mon exeat. Un minuscule bout de papier mal tapé à la machine dont j'avais besoin pour être libérée de tout ça. Voilà, j'avais plus rien à voir avec tout ça ! J'ai pris du recul, j'ai rencontré des gens hors de mon milieu, qui n'avaient pas d'a priori sur moi, et un jour j'ai eu une illumination : je me suis dit "mais en fait même si on est naze, on a tous droit d'être sur cette Terre et de vivre comme on en a envie !? Je suis née tout comme ils (ceux qui m'ont fait ch**) sont nés, ils ont pas + de droits que moi d'exister, et ils ont pas non plus un mandat qui les autorise à décider comment on devrait être". Je devais avoir 17 ou 18 ans. Le déclic, ça a été parce qu'une personne avec qui j'avais sympathisé (et qui ignorait mon "passé") m'a dit un jour "Ohlala j'ai parlé avec quelqu'un qui te connaît, dis donc c'est vrai qu'au collège nanananana (des mythes sur ma vie), on m'a dit de pas te parler etc.?". Or, tous les adultes responsables m'avaient toujours répété que le problème c'était moi, que je "faisais des histoires", que j'étais pas assez adulte. Et là je me disais "mais en fait c'est eux les abrutis, c'est eux qui aiment les histoires, si 10 ans après ça les amuse toujours autant, c'est que finalement je suis peut-être pas totalement coupable !?" (les adultes m'avait bien mis dans le crâne que j'étais responsable de tout).
Ca m'a clairement pourri la vie, ça a duré des années, et ça aurait pu avoir des conséquences graves car j'ai fini par avoir un comportement destructeur et à un certain stade j'ai sérieusement pensé à en finir. En plus, j'ai complètement saccagé ma scolarité (tout ça avait commencé parce que j'avais une tête d'intello, que j'étais 1re de la classe, que ma maman m'habillait avec des chemisiers à dentelle, et que j'étais hyper naïve dans le sens où je ne détestais personne et où j'aurais jamais fait de mal à une mouche) et je savais absolument pas quoi faire de ma vie. D'un coup bah fallait que je décide et j'avais plus aucun but. Dure période. Ca a probablement eu des incidences sur ma vie "après" aussi
(comme contribuer à faire de moi une proie idéale à pervers narcissiques
)
Bon, je m'en suis finalement bien sortie, en fait dès que j'ai arrêté le lycée, que je me suis éloignée de cet univers, j'ai eu une vie sociale normale, et je me suis même rendu compte qu'en fait, je m'entendais plutôt bien avec les gens que je côtoyais, et qu'on m'appréciait : le contraire total de toute cette époque... Je n'ai jamais eu aucun problème à la fac, dans aucun de mes cursus (j'en ai fait plusieurs, après avoir finalement préparé le bac toute seule), au contraire, j'étais pote avec tout le monde.
J'ai recroisé certains de ces "gamins" en prenant le train, et on s'entend bien maintenant.

Eux n'ont jamais réalisé l'impact de tout ça... mais les adultes, ceux qui étaient là pour nous encadrer, pour nous protéger, ceux qui ont vu énormément de choses mais qui ont considéré que j'étais un problème et que je les gênais à me faire sans arrêt emme*der, ils ont vraiment pas été à la hauteur. Et les parents, ils m'insultaient, me disaient que je devrais avoir honte d'accuser des enfants innocents, que les leurs n'auraient jamais fait de mal à personne. Malheureusement pour moi, mes parents à moi partaient du principe qu'on ne pouvait pas savoir comment se comportaient les enfants, donc ils me soutenaient mais sans prendre mon parti, ils disaient toujours "nous on veut juste la vérité. On dit pas que c'est elle qui a raison, on sait pas." mais les autres parents disaient "Elle ment. Mon enfant dit qu'il n'a rien fait et je sais qu'il dit la vérité, je le connais." Donc je faisais pas le poids. Je comprends le point de vue de mes parents cela dit. J'aurais aimé qu'ils me soutiennent plus... qu'ils me disent que c'était pas moi (à eux aussi, on avait dit que le problème c'était moi, et ils le croyaient, puisque j'étais la seule emmerdée de l'école, ils me disaient que j'étais pas assez open aux autres, etc.)... mais ils savaient pas quoi faire, à part me laisser être absente.
