50. Salif Keita : M’Bemba (world)
Après le génial “Moffou”, Salif Keita continue sur sa lancée acoustique avec ce nouveau « M’Bemba ». Sa voix est toujours à tomber et le disque bien agréable, mais malheureusement il n’y a aucun morceau de la trempe de « Iniagige » ou « Ana Na Ming » (sur le « Moffou » susnommé).
49. Kanye West : Late Registration (rap)
Kanye West m’a bluffé avec son premier album, “The College Dropout”, classique hip-hop instantané, et j’attendais probablement trop de ce deuxième disque aux critiques dithyrambiques. La déception passée, j’ai pu enfin écouter ce « Late Registration » attentivement et me rendre compte qu’il contenait somme toute son lot de moments bien jouissifs (au premier rang desquels je mettrai le titre « Diamonds From Sierra Leone »).
48. 13 & God : 13 & God (rap)
Le fameux label hip-hop Anticon nous propose cette « confrontation » entre le groupe de hip-hop Themselves et le groupe de rock Notwist : ça donne 13 & God. Chacun est à l’écoute de l’autre, ce qui donne, au final, une franche réussite.
47. Stade : Tactile (rap/electro)
Audétat (claviers, sampler) et Calpini (batterie, sampler), invitent les rappeurs Infinite Livez et Wayne Paul sur leur projet hip-hop/reggae/electro/jazz/expérimental (oui tout ça !). Le résultat est ardu, violent, inventif. Ca grouille de partout, les sons sont triturés dans tous les sens, ça racle, ça crisse – que c’est bon ! Plusieurs invités prestigieux sont de la parte : Nils Petter Molvaer et le musicien d’avant-garde Elliott Sharp notamment.
46. Sainkho Namtchylak : Forgotten Streets Of St. Petersburg (jazz/world)
L’étrange Sainkho Namtchylak, chanteuse de la République de Tuva, nous emmène pour un périple expérimental avec groupe de jazz russe. C’est ardu à suivre, ça ne s’apprivoise pas rapidement, mais les efforts consentis aux premières écoutes de cet ovni sont récompensés avec le temps.
45. Kronos Quartet/Asha Bhosle : You’ve Stolen My Heart (musiques nouvelles/world)
Le Kronos Quartet poursuit sont tour du monde et fait une halte du côté de l’Inde et de Bollywood plus particulièrement. Accompagnés de la chanteuse (et immense star en Asie) Asha Bhosle, le groupe rend homme au compositeur R.D. Burman, l’équivalent asiatique d’un Ennio Morricone. Le résultat est étonnant et réussi.
44. Jon Hassell : Maarifa Street (jazz/world/electro)
Jon Hassell est un musicien aussi important que Brian Eno ou David Byrne, sauf que la plupart ont tendance à l’oublier. Il nous ressert ici sa mixture de musique ambiante, de rythmes orientaux, de jazz cool (Hassell est trompettiste) et de délicates touches électroniques. Pas son meilleur album mais ça n’en reste pas moins bien agréable.
43. Marc Ribot : Spiritual Unity (jazz)
Le guitariste Marc Ribot s’attaque au répertoire d’Albert Ayler. Il s’entoure, notamment, du bassiste Henry Grimes (qui joua avec Ayler) et nous sort un étrange album de free sans saxophone. L’album contient cinq longs morceaux qui prennent leur temps et qui ne s’apprivoisent pas du premier coup. Lorsque l’on y entre, le disque dévoile des merveilles que l’on avait pas soupçonnée tout de suite.
42. Yusef Lateef : Influence (jazz)
Le vieux sage Yusef Lateef, plus de 80 ans, est convié par la jeune garde du jazz français (les frères Belmondo) à enregistrer un nouveau disque (le dernier peut-être ?) rempli de cordes, de beaux solos bien apaisés ou plus enlevés. Encensé partout, ce disque ne m’a pas totalement convaincu pourtant (j’en conviens volontiers). Mais il est indéniable que quelque chose (une spiritualité peut-être) s’en dégage.
41. Eels : Blinking Lights And Other Revelations (pop)
L’un des rares disques de pop à m’avoir touché cette année (il faut dire que je commence à être allergique à la pop depuis quelque temps déjà). E, le chanteur de Eels, avec deux ou trois bouts de ficelle, compose de petites vignettes qui font constamment mouche. Certes on est loin du sublime (mais complètement déprimé) « Electro-Shock Blues » sorti il y a quelques années mais quasiment tous les morceaux de ce double album contiennent au pire une idée qui retient notre attention.
40. Brian Eno : Another Day On Earth (pop/electro)
Eno renoue avec la voix, une voix (la sienne donc) toujours aussi faussement impersonnelle et sans passion qui lui permet de toucher du doigt la solitude qui est la nôtre dans un monde de plus en plus citadin et étouffant. Une sacrée leçon de songwriting encore une fois.
39. Elysian Fields : Bum Raps And Love Taps (pop/folk)
Jennifer Charles et Oren Bloedow ne forment plus un couple. Mais ils continuent à travailler ensemble et nous livrent, avec ce « Bum Raps And Love », le meilleur album d’Elysian Fields. Les morceaux se sont allongés, les ambiances sont bien plus mélancoliques que par le passé, le voix de Charles est toujours aussi lascive.
38. Steve Reid Ensemble : Spirit Walk (jazz)
Le batteur Steve Reid a joué avec Fela, Miles Davis, James Brown, Sun Ra, Horace Silver et j’en passe (excusez du peu!). Il revient en 2005 avec ce « Spirit Walk », et on n’en croit pas ses oreilles. Sur cet album, il est accompagné, en plus de son groupe, de Kieran Hebden, bidouilleur electro de Four Tet. Le résultat est détonant. Ca groove, ça expérimente dans tous les sens. Bref tout ce que j’aime. Je viens de l’acheter et n’ai donc pas pu beaucoup l’écouter encore. Mais assurément ce disque est promis à un bel avenir chez moi (et mérite, j’imagine, bien plus que sa 38ème place).
37. Gilad Atzmon : Musik/Re-Arranging The 20th Century (jazz)
Intituler un disque “Re-Arranging The 20th Century”, il ne faut douter de rien ! Et effectivement c’est trompeur. Ce disque se contente de revisiter avec talent la musique klezmer. Gilad Atzmon nous enchante de solos de sax dévastateurs. C’est déjà pas si mal et même beaucoup. Pour le côté « people », à noter que lui et Zorn ne peuvent pas se voir.
36. Spleen : She Was A Girl (soul/rap)
Spleen, c’est un peu le pendant soul des Coco Rosie, Devendra Banhart ou Antony And The Johnsons. « She Was A Girl » est son premier album, un mélange de soul donc, mais également de hip-hop, de folk aussi. Sur la durée (l’album est long) c’est parfois ennuyeux, ce qui n’empêche pas de vrais grands moments. En tout cas ça promet de belles choses pour l’avenir.
35. Jamie Lidell : Multiply (soul/funk/electro)
Première écoute : gros choc. Je crois que je tiens mon album soul/funk de l’année. Deuxième écoute : bon j’ai réagi peut-être un peu vite, c’est vraiment pas mal quand même. Troisième écoute : je vais me remettre le John Legend. En bref je suis resté longtemps perplexe face à ce disque. Je l’ai réécouté récemment et il me semble y voir un peu plus clair : pas mal de gimmicks qui cachent des morceaux dans le fond assez quelconque (mais très agréables) et quelques vraies merveilles également (notamment ce « Newme », l’un de mes singles de l’année).
34. Fredy Studer/Hamid Drake/Michael Zerang : Drumming Chicago (jazz)
Un disque de batteurs, ça vous dit ? Plus qu’un disque de batteurs, il faut en fait parler d’un disque de percussionnistes ! Fredy Studer, Hamid Drake et Michael Zerang nous convient à un véritable voyage rythmique ET mélodique tout au long de ces neuf plages jamais ennuyeuses.
33. William Parker : Sound Unity (jazz)
Le bassiste William Parker nous propose cet album live enregistré en quartet dans la lignée du mythique quartet d’Ornette Coleman qui inventa le free jazz à la fin des années 50. Rob Brown est à l’alto sax, Lewis Barnes à la trompette et le génial Hamid Drake derrière les fûts. La plupart des solos sont inspirés, le swing est monumental, les musiciens sont en parfaite adéquation. Que demander de plus ?
32. Dave Douglas : Mountain Passages (jazz)
Superbe album de jazz acoustique et classique oserais-je dire. Dave Douglas convie un quartet très inspiré à jouer des thèmes tous liés à la montagne. Les moments forts ne manquent pas.
31. Céu : Céu (world)
Excellente découverte brésilienne. Céu est une jeune chanteuse qui malaxe bossa nova, pop, reggae même (reprise réussie d’un titre de Marley) le tout saupoudré de discrets arrangements électroniques. Tout passe avec facilité (alors que ça casse complètement chez une Cibelle par exemple).
30. Red : Nothing To Celebrate (folk)
Red est une sorte de Tom Waits français. Sa voix est grave et désabusée, sa musique est dans la lignée d’un Will Oldham (présent sur plusieurs titres du disque). Surtout, Red sait composer des putains de chansons ! Son « Nothing To Celebrate » qui clôt l’album est peut-être le titre que j’ai le plus écouté cette année.
29. Monnette Sudler : Meeting Of The Spirits (jazz vocal/blues)
Très belle surprise. Monnette Sudler est une chanteuse/guitariste de jazz/blues de Philadelphie. Complètement oubliée, elle est redécouverte en 2005 sur l’initiative de quelques amoureux de musique et c’est tout bénéfice pour nos oreilles.
28. Meshell Ndegéocello : The Spirit Music Jamia : Dance Of The Infidel (soul/jazz)
Meshell s’éloigne du monde soul/funk/rap qui est le sien pour entrer dans celui de la fusion (à la Weather Report). Points positifs : le jeu de basse de Meshell et son sens du groove, les différents intervenants tous très inspirés. Point négatif : la voix douce et profonde de Meshell a été rangée dans le placard.
27. Vashti Bunyan : Lookaftering (folk)
Chronique dans la lignée du Marissa Nadler : voix pure, songwriting de qualité et de petits joyaux qui se ramassent sans même les chercher. Beau retour après plus de trente ans d’inactivité musicale !
26. New Thing : New Thing (jazz)
Une compil pour changer. Comme son nom l’indique, « New Thing » s’intéresse à cette « nouvelle chose » apparue au début des années 60, appelée aussi « free jazz ». Ce double CD regroupe des titres d’artistes connus (Archie Shepp, Alice Coltrane, Art Ensemble Of Chicago, Sun Ra, etc.) mais également des titres d’artistes beaucoup plus obscurs. Et c’est là où cette compilation devient intéressante. Je m’en suis mis plein les oreilles à l’écoute des morceaux de Maulawi, Hannibal, Eddie Gale ou Steve Davis (en français dans le texte pour ce dernier).
25. Marissa Nadler : The Saga Of Mayflower May (folk)
Un peu de douceur folk pour continuer. Avec ce « Saga Of Mayflower May », Marissa Nadler poursuit sur la lancée de son premier disque remarqué. Sa voix est pure comme de l’eau de roche, la musique fait penser au meilleur Cohen (soit aux trois premiers albums). « Lily, Henry And The Willow Trees » est une de ces perles qui garnissent bien agréablement une année.
24. Masada : 1994-1997 – Unreleased Studio Recordings (jazz)
Me lasserai décidément jamais de ce quartet (que j’ai eu la chance de voir en concert cet été avec freak). Théoriquement ce double album regroupe des chutes de studio. Et quelles chutes ! Il n’y a rien à jeter. C’est puissant, rageant, violent, précis. Une chose cependant toujours étonne : Cohen (basse), Baron (batterie), Douglas (trompette) et Zorn (saxophone et maître de cérémonie) possèdent-ils le don de télépathie ? On peut raisonnablement se le demander à l’écoute de ces morceaux.
23. Magic Malik : Orchestra (jazz)
J’adore Malik, ses envolées de flûte, son groove, l’architecture de ses morceaux. Cet « Orchestra » (à noter que le précédent s’appelait déjà « Orchestra » - bref difficile de s’y retrouver) continue sur la lancée des premiers albums mais la maîtrise est toujours plus grande.
22. Joe Bataan : Call My Name (soul/funk)
Voilà le disque le plus décalé de l’année. Joe Bataan est un Latino new-yorkais, durant les années 70 et au début des années 80, il a produit une musique basée sur le groove, une sorte de funk-latino. Pendant plus de vingt ans, il s’est fait oublier. Et là il revient, en 2005, à l’exact endroit où il s’est arrêté à l’époque. Autant dire qu’il est impossible de deviner que ce « Call My Name » est sorti durant les années 2000. Le son, le groove qui se dégagent de ce disque sont estampillés « années 70 » et personnellement ce n’est pas pour me déplaire (idem pour mes guiboles qui se sont mises à bouger toutes seules lorsque j’ai mis le disque pour la première fois). Jouissif !
21. Mina Agossi : Zaboum/Well You Needn’t (jazz vocal)
Une chanteuse de jazz contemporaine pour changer. Mina Agossi est une franco-béninoise dont l’art est plus proche de celui d’une Jeanne Lee plutôt que celui d’une Dee Dee Bridgewater au hasard (ce qui n’est pas pour me déplaire). Sur ces deux disques, elle est essentiellement entourée d’une rythmique (basse/batterie) sur laquelle elle dépose sa voix libre. Mina Agossi parvient notamment au tour de force de rendre une copie parfaitement originale du vieux tube archi usé d’Ellington « Caravan » (sur « Zaboum »).
20. John Legend : Get Lifted (soul)
Petite année en nu-soul. Vraiment pas grand chose d’intéressant à ce mettre sous la dent en 2005. Ce disque n’a donc pas de peine à s’élever au-dessus de ce r’n’b incroyablement formaté (mais quand est-ce que ça va s’arrêter, tous les disques se ressemblent) puisqu’il s’en écarte. John Legend choisit la voix d’une soul tout ce qu’il y a de plus classique et s’en sort avec les honneurs. Voix chaude, morceaux qui contiennent de vraies mélodies et un sommet où le crooner est seul au piano : « Ordinary People ».
19. Dangerdoom : Dangerdoom (rap)
MF Doom est probablement le meilleur MC actuel. Il enchaîne les projets et il touche toujours juste. Ici il collabore avec Danger Mouse, auteur il y a peu d’un « Grey Album » (mix entre le « White Album » des Beatles et le « Black Album » de Jay-Z) qui a fait beaucoup parler. Ce « Dangerdoom » enchaîne les sommets, je citerai, entre autres, « Sofa King », « The Mask », le tubesque « Benzine Box » ou le génial « Crosshairs ». Je suis de plus en plus accroc à ce genre de trucs.
18. John Tchicai Big Chief Dreaming (jazz)
John Tchicai, saxophoniste, s’est fait connaître dans les années 60, en pleine émergence free jazz. Il était, à l’époque, un peu dans la marge. Le free jazz étant une musique de marge, ça nous fait, avec John Tchicai, un musicien issu de la marge de la marge. Ca fait beaucoup, j’en conviens. Je dis des conneries ? J’en conviens encore ! Mais ce disque n’est pas une connerie, assurément. La musique ici proposée est assez étrange, un peu avant-gardiste mais jamais « hurlante » (comme durant les grandes années). Le sax est accompagné d’une rythmique qui fait constamment mouche, d’un guitariste « maillon faible » (un peu lourd parfois) et d’un deuxième sax en parfaite adéquation avec le premier. La sonorité de Tchicai est superbe.
17. Vinicius Cantuária : Silva (world)
Vinicius Cantuária nous sort son album de bossa classique annuel. Rien de profondément original mais rien à jeter non plus. Vous aimez la bossa nova à la Jobim (c’est mon cas), vous adorerez cet album.
16. Tcheka : Nu Monda (world)
Découverte africaine (Cap Vert) de l’année. Concept original : Tcheka retranscrit des parties de percussions sur guitare. Ca donne des morceaux assez syncopés parfois mais toujours très mélodiques. Et comme le bougre sait changer en plus, ce n’est plus que du bonheur au final.
15. Sufjan Stevens : Illinois (pop/folk)
L’un des sommets pop-folk de l’année. Que dire ? A partir du titre numéro 9 (« Chicago ») et jusqu’au numéro 22 (le dernier), ça touche quasiment à la perfection. Certains arrangements flirtent avec la baroque. Bref c’est fortement conseillé et ça devrait même plaire à beaucoup de monde (c’est pas Fade Out qui va me contredire).
14. Coco Rosie : Noah’s Ark (folk)
Deuxième disque des deux sœurs dans la parfaite lignée du premier. Ca « bidouille » toujours aussi bien, les morceaux sur ce « Noah’s Ark », dans l’ensemble, ont même fait un bond dans la qualité par rapport au premier album. Seul petit bémol : à long terme, la formule utilisée risque peut-être de lasser.
13. Denys Baptiste : Let Freedom Ring (jazz)
On se croirait revenu au temps de la « Freedom Suite » de Sonny Rollins ou du mythique « We Insist ! Freedom Now Suite » de Max Roach. Quatre morceaux pour cet album sorti en 2003 en Angleterre mais seulement en 2005 ailleurs (donc ici). Ca sonne un peu comme un big band parfois, c’est tour à tour classique et free, Ben Okri vient poétiser sur la première partie, ça rappelle un peu l’Attica Blues Big Band de Shepp. Bref j’adore !
12. Byard Lancaster : A Heavenly Sweetness (jazz)
Deuxième redécouverte de Philadelphie de l’année après le Monnette Sudler. Byard Lancaster joue tout à tour du sax, de la flûte et donne même de la voix ici ou là. Ca foisonne de percussions également et c’est constamment inventif. Rien à ajouter, c’est exactement le genre de musiques que je recherche.
11. Little Brother : The Minstrel Show (rap)
Retour au hip-hop old-school. “The Minstrel Show” est le deuxième album de Little Brother et assurément l’avenir s’annonce radieux pour le trio. Ca fait parfois penser au hip-hop positif d’A Tribe Called Quest ou de De La Soul. Album rempli de soul (comme devraient l’être TOUS les albums), il a longtemps tourné sur ma platine lorsque je l’ai reçu (et s’invite encore régulièrement).
10. Roots Manuva : Awfully Deep (rap)
Cet album est une des bombes hip-hop de l’année ! Roots Manuva est la MC anglais le plus charismatique et talentueux, haut la main. Il nous sert ici des merveilles tour à tour rap, ragga, dub, electro et j’en passe. C’est constamment inventif. Et sa voix grave fait merveille !
9. Chico Saraiva : Trégua (world)
Classique instantané ! Un jeu de guitare à la Baden Powell, des mélodies dignes d’un Jobim, des voix fatalement romantiques à souhait. Quatorze titres, quatorze perles, depuis plusieurs années, c’est bien au Brésil que je trouve mon paradis pop.
8. Totonho : Sabotador De Satélite (world)
Chtarbé ! Tom Zé, Hermeto Pascoal, Totonho, ils sont tous à la ramasse (et bien corsés en plus) et ils viennent chacun du Nordeste : que peut-il bien se passer là-bas ? Totonho est le moins connu des trois, il est pour moitié musicien et pour moitié éducateur de rue. Sa musique ? Un mélange de folklore local, de boîtes à rythmes primitives et de percussions endiablées. Et par-dessus sa voix, tour à tour caressante, hurlante, hilarante, débile. Le pire, c’est que lorsque l’on entre dans ce délire, il devient très difficile d’en ressortir. Disque le plus drôle de l’année (plus drôle encore que le Tom Zé). Mais attention, que ce soit chez Tothono ou chez Tom Zé, l’humour déployé n’est, au final, jamais très optimiste.
7. Common : Be (rap)
Ce Common regorge de tubes, c’est assez dingue. Il fait un peu penser au premier album de Kanye West (normal Kanye West est à la production) mais avec un rappeur digne de ce nom (Common est effectivement un bien meilleur rappeur que Kanye West). Les basses sont puissante, le son bien chaud, les mélodies toujours présentes et la pochette même est une réussite. Mon disque de hip-hop de l’année !
6. Tom Zé : Estudando O Pagode (world)
J’aime ce type. C’est une évidence. Depuis quelques années, c’est assurément l’un des trois ou quatre musiciens que j’écoute le plus. Et pourtant ce disque m’a presque déçu dans un premier temps. J’en attendais probablement trop. Puis le temps a avancé et je me suis rendu compte que pour un album qui me décevait, il revenait bien souvent sur ma platine. Avant de me rendre compte que Tom Zé était une nouvelle fois bien trop en avance sur son temps pour être compris instantanément. Cet album est une sorte de mini opéra sur la condition des femmes. Ca fournit d’ironie ET de tendresse, d’humour ET de mélancolie. Vu Tom Zé au Montreux Jazz Festival cette année, c’est de loin (avec Masada quand même) ce que j’ai vu de mieux en concert en 2005.
5. Camille : Le Fil (chanson française)
Je ne suis vraiment pas trop « chanson française » et ce « Fil » de Camille est un peu l’exception qui confirme la règle. Peu de disques ont squatté aussi longtemps ma chaîne que cette charmante petite galette (moins de 35 minutes si je ne dis pas de bêtises). C’est bien simple, j’aime tout dans cet album : des paroles espiègles ou profondes, des mélodies tour à tour drôles ou mélancoliques, une voix qui a choisi le pari (risqué) de la diversité – et le pire c’est que ça fonctionne toujours. Chapeau bas !
4. Billy Bang : Vietnam – Reflections (jazz)
Quelle beauté! Billy Bang n’en a pas fini avec ses démons et si j’osais, ça serait presque tant mieux pour nous. Après un somptueux « Vietnam : The Aftermath » sorti il y a quelques années et avant un troisième chapitre déjà prévu pour boucler sa trilogie, il nous sort ce « Vietnam : Reflections », plus calme et plus serein que son frère aîné. Billy Bang et un ancien G.I. reconverti au jazz (son instrument est le violon, c’est plutôt rare dans le genre) et les souvenirs de la guerre du Vietnam le poursuivront jusqu’à sa tombe probablement. Alors il a décidé de nous faire partager ses interrogations. Sur ce disque, il nous gratifie, entre autres (car TOUT est merveilleux) de deux ballades (« Doi Moi » et « Waltz Of The Water Puppet ») qui me font, personnellement, venir les larmes à chaque fois. Il faudrait avoir le cœur malade pour ne rien ressentir à l’écoute de ce disque. Album idéal à mon avis pour entrer dans le jazz et découvrir ses splendeurs.
3. David S. Ware : Live In The World (jazz)
David S. Ware est le dernier « monstre sacré » du free jazz. Il nous propose trois cd avec ce « Live In The World », captés ça et là au gré de concerts ou de festivals. C’est tellement riche et intense que je suis loin d’en avoir fait le tour encore (je peux dire que je ne connais bien que le premier cd pour le moment, qui est exceptionnel). Ware est probablement (si l’on excepte l’intouchable Wayne Shorter) mon sax contemporain préféré, Matthew Shipp (qui fait partie du quartet) mon pianiste favori, Hamid Drake (présent sur le deuxième cd) le batteur qui m’impressionne le plus, sans oublier le géant William Parker, monumental derrière sa basse.
2. Antony And The Johnsons : I Am A Bird Now (pop/folk/soul)
Que dire encore sur ce disque ? Je crois que j’entretiens un rapport assez ambigu avec la voix d’Antony. Elle me fascine et c’est limite malsain. J’aime cette voix qui n’est ni une voix d’homme ni une voix de femme. Elle me trouble, m’émeut, m’angoisse, me rassure, etc. Derrière cette voix cependant, il faut relever la qualité des compositions d’Antony. « Hope There’s Someone », « Man Is The Baby », « Fistfull Of Love » ou « Spiralling » sont juste merveilleux.
1. Wayne Shorter : Beyond The Sound Barrier (jazz)
Imaginez un poteau. Entourez-le de quatre élastiques (qui représentent chacun les quatre instrumentistes du quartet de Wayne Shorter). A partir de là, chaque musicien, tout à tour ou en même temps, va tourner son élastique autour du poteau, va l’allonger à l’extrême limite de la rupture sans que jamais il ne casse cependant. La probabilité de se trouver deux fois exactement au même endroit est pratiquement impossible. Et pourtant les quatre musiciens, liés qu’ils sont à leur poteau commun, sont toujours en osmose. Ma métaphore est bien maladroite pour tenter d’expliquer ce que je ressens à l’écoute de ce disque live qui est celui qui m’a amené le plus loin cette année. Wayne Shorter (saxophones), Danilo Perez (piano), John Patitucci (basse) et Brian Blade (batterie) produisent une musique insensée, d’une liberté inouïe, d’une intensité affolante, d’une émotion quasiment palpable. C’est tellement subjuguant que l’on entend parfois le public rire de jouissance !
Et vous ? Quels sont vos albums préférés sortis cette année ?
Pas besoin d'en mettre 50, hein.