
Poussé par mes amis qui ne sont pas du genre à se prostituer pour se payer leur came, ni à balayer les rues pour nourrir leur quatre gosses, mais plutôt à se complaire de leurs salaires d’officiers grassement payés à rien foutre depuis qu’il n’y a plus de guerre (et d’ailleurs, s’il y en avait une, ils seraient bien les premiers à déserter de peur de se faire bobo) c’est avec un certain retard que je l’ai vu, mais je l’ai vu. Enfin presque. J’ai tenu exactement 48 minutes.
Campons le décor : un gigantesque appart’ à 9000 € le m², plein de livres, plein de souvenirs, plein de confort. Le rêve de tout citadin qui se respecte. Là-dedans vont se retrouver pour un dîner entre amis la quintessence de la petite bourgeoisie parisienne.
Pierre (Charles Berling, 54 ans, censé représenter un quadra). Prof à la Sorbonne. Adoré de ses étudiants et auteur d’ouvrages confidentiels. Porte des costumes en velours côtelé.
Elisabeth (Valérie Benguigui). La petite prof du secondaire. Gentille, mais pas trop fute-fute. Aime faire la cuisine elle-même, et apparemment mal.
Vincent (Patrick Bruel, 53 ans, qu’on essaye de faire passer pour un quadra). Le beauf de base. Frère d’Elisabeth. Agent immobilier se déplaçant en 4X4 en plein Paris.
Claude (Guillaume de Tonquédec). Tromboniste à Radio France, ami d’enfance d’Elisabeth. Neutre et sans personnalité.
Les personnages sont là. Quatre caricatures. Le prof à la Sorbonne et son épouse votent bien évidemment à gauche, et plus à gauche que le PS, bien sûr. C’est pas parce qu’on possède un appart’ de 300 m² en plein Paris qu’on ne peut pas se donner bonne conscience, non mais.
Quant à Claude … Un chef d’œuvre, celui-là. Présenté comme fin, gentil et charmant, il se contente de plaisirs simples, est l’ami des femmes, aimait la danse quand il était petit et on ne lui connait pas de copine. Hum hum … Suivez mon regard. On aura tous compris que c’est la grosse tapette de base bien dans son placard, histoire de ne pas déranger les voisins. Mais chuuuuut. C’est un secret. Ne parlons pas trop fort, les enfants sont couchés.
L’agent immobilier, frère de l’épouse et qui n’a lu qu’un livre vote bien évidemment à droite, mais se révèle bien sûr plus fin et brillant que son beau-frère prof à la Sorbonne. Il va faire une petite énormité qui va bousculer ce petit monde, sinon il n’y aurait pas d’histoire.
Qu’est-ce que c’est que ce truc ? Une critique en douceur des gauchistes qui ne pensent en fait qu’à s’embourgeoiser ? Une démonstration que les gros beaufs de droite portant Rolex sont plus malins et démerdards que les profs de lycée ou de la Sorbonne ? J’ai trouvé ce film consternant. Ces petits malheurs de petits bourgeois confis dans leurs petites certitudes, ces petits drames autour du choix d’un bête prénom (que j’avais deviné à la troisième réplique) pour un bête gosse, ces petites tempêtes dans un verre d’eau, ou plutôt de Château Margot (c’est un autre vin, en fait, mais j’ai oublié lequel) … Insupportable. Aucune conscience sociale. Aucune grandeur dans les personnages. Juste un discours plat et hypocrite tendant à se moquer en douce de ces gauchistes parisiens qui se vautrent dans le confort en n’assumant pas leurs goûts de luxe. Après « Les Invités de Mon Père », et « Les Femmes du Sixième Etage », c’était mon troisième film UMP qui se résument tous les trois par par : « on est Parisien, on a du pèse, mais voyez nos problèmes, nous sommes bien à plaindre, vous savez, et les gauchistes sont juste des jaloux qui veulent faire comme nous. En plus on a de l’humour. Voyez : on sait rire. La preuve : Ahahah ! Et proute, ma chère ...».
Je ne demande qu’à être détrompé : je n’ai pas vu la dernière heure du film.
Délivrez-moi d’un doute : je suis devenu communiste ou je suis juste jaloux de leur appart’ ?
