Voilà 32 ans au compteur, et seulement 2 ans de coming out !
Mes parents sont divorcés, et chacun remariés avec chacun deux autres enfants. J'ai autrement un grand frère du premier mariage. C'est pour fixer le contexte.
Je veux surtout ici te parler de mon père, car la lecture de ton témoignage (qui me bouleverse, moi qui pourtant suis taillé dans le roc d'Armorique, j'en ai les larmes aux yeux) me rapproche tellement de vous !
Je me suis affirmé aux yeux des autres (outé ou coming out) d'un seul bloc, ça a été intensif et soudain, une 60aine de personnes de mon entourage.
Cet entourage, une asso de musique, comprend justement aussi mon père et deux de mes frères, dont mon aîné. Ils n'ont pas fait partie de la confidence dans les premiers, mais la pression que je me suis imposée m'a obligé à révéler mon homosexualité à ce père dont je craignais par dessus tout la réaction. Mais je craignais surtout qu'il ne l'apprenne par une tierce personne.
donc un soir d'août je me sui lancé. Il est un peu comme tu décris ton mari, comme dit Mady aussi les pères en général, pas très expansif !
Il a été choqué, c'est sûr, d'autant qu'il ne s'y est pas du tout attendu, jusqu'à mes 30 balais (pourtant on est en très bons termes).
Mais il m'a dit qu'il m'aimerait toujours, que j'étais son fils, que cela ne changerait rien. Cela dit, il m'a aussi montré son émoi, que l'homosexualité "ce n'étais pas son truc (sic)".
Bien que soulagé d'un poids énorme, étouffant, je suis alors entré dans une longue période de non-dit, de silence sur ces questions, de gêne perceptible, de honte peut-être de sa part je ne sais pas !
Au premier de l'An suivant, j'ai craqué, je lui ai écrit une lettre de 7 pages où je lui disais que je ne voulais plus, après 30 ans de cachoterie, vivre dans le silence, dans CE silence, que je l'aimais ainsi que toute ma famille, et que je voulais qu'on vive cette différence tous ensemble.
Le lendemain, il est venu et m'a pris dans ses bras, j'ai un peu halluciné car lui aussi c'est un peu un menhir au niveau des sentiments !
Et pourtant, aujourd'hui encore, on n'en parle toujours pas de manière libérée comme je le souhaiterais ! Mais je me dois de le respecter dans ce long cheminement qui sera le sien.
On s'aime, c'est le principal, il n'y a pas de rejet, je respecte ses craintes, ses interrogations, le fait aussi que la chose s'ébruitant (c'est inexorable), il doit être solide pour affronter ça !
Je ne sais pas si j'aurais des enfants ! Même moi je ne suis pas fixé sur ce plan. Mon frère aîné a deux petites adorables nièces, et il reste mon frère de 16 ans et ma soeur de 9 ans derrière moi (et lui est un indécrotable dragueur de nanas heureusement j'allais presque dire) !
Voilà, si toi et ton mari lisent ces lignes, elles ne valent que pour la singularité d'un témoignage, mais elles montrent que toi Véro ainsi que ton mari, vous n'êtes terriblement pas seuls, en ce sens nous sommes tous une communauté de destin !
Le temps fera le reste...
Gros bisous à Mady et à toi et ta famille, et à tous les Et-Aloriens !
A bientôt.
Nathan (je vais me moucher je suis ému mais heureux