homosexualité et enseignement
-
ExMembre L
Petit témoignage.
Je suis prof en collège, et la plupart des gens sont au courant de mon homosexualité, aussi bien les collègues que les élèves.
Et pourtant je suis près d'une cité pas forcément accueillante au premier abord (ils ont quand même brûler un chameau pendant les émeutes de novembre 2005, c'est tout dire !). Plus beaucoup d'élèves musulmans et un machisme primaire assez problématique. Alors c'est sûr au début on se dit qu'un coming-out, non merci.
Mais en fait, cela ne pose pas forcément de problème particulier. Explications.
Parlons d'abord des collègues : je dirais que cela peut être plus facile de faire son coming-out dans ce type d'établissement plus ou moins difficile, car l'équipe des profs est très jeune (logique, il y a énormément de nouveaux profs fraichement débarqués de l'IUFM - et oui, quand on est nouveau et célibataire, on a que 21 points pour les mutations la première année, alors vous faites pas d'illusion, il y a de très grandes chances pour que vous me rejoignez en région parisienne
), d'où une grande ouverture d'esprit chez les collègues. C'est pas comme dans les établissements plus pépères où la moyenne d'âge est de 45 ans et où les mentalités sont plus ... euh... conservatrices.
Cela rend les choses plus simples, les relations plus vraies, et puis il ne faut pas oublier que cela parle énormément Q en salle des profs (
, alors rester dans le placard vous met dans une situation d'exclusion
ou de dissimulation.
pas top quoi.
Parlons des élèves ensuite : je rejoins les témoignages et commentaires précédents. Les élèves ont pour première préoccupation de savoir si tu es un bon prof ou pas. S'ils ne t'aiment pas (généralement parce qu'ils considèrent que tu es un mauvais prof), c'est sûr, ils vont utiliser ton homosexualité comme argument pour te casser. Et là pas drole. Par contre, s'ils t'aiment bien (pour X raisons), ils n'en ont rien à faire.
Perso, j'ai fait mon coming-out auprès de mes èlèves en plein cours. C'était au moment des émeutes de novembre 2005. Alors forcément, je rebondis pé-da-go-gie pour faire le lien avec mon programme d'éducation civique sur l'égalité et les discriminations. Après avoir passé une heure avec eux pour tenter de trouver le pourquoi du comment des émeutes (dont certains ont du participer je pense), je consacre le cours suivant pour démontrer que les manifestations pacifiques mais militantes et une bonne représentation dans les médias sont bien plus efficaces que la méthode musclée et violente pour réclamer des droits et la fin des discriminations, en prenant l'exemple des LGTB.
A un moment du cours, je montre un montage de photos de personnages gays et lesbiens de séries télés, pour leur faire constater qu'ils en avaient une bonne image généralement, et que donc c'était efficace pour lutter contre les préjugés. J'en profite pour leur dire que cela sert aussi pour les jeunes gays et lesbiennes qui peuvent se sentir mieux en les voyant s'ils sont isolés - et que cela peut les encourager à faire leur coming-out. D'où effet boule de neige car leurs connaissances connaîtraient des LGBT et donc auraient une meilleure image des LGBT, etc... bon vous connaissez le topo, pas besoin de vous faire un dessin.
C'est alors qu'un de mes élèves "potentiellement difficile", qui participait énormément depuis qu'on parlait des émeutes (pour une fois !), m'a posé la question fatidique à 10.000 euros : "Et si les profs étaient gays, ils nous le diraient ? Par exemple, si vous vous l'étiez, vous nous le diriez ?"
Eeeeeeuuuuuuuuuuhhhhhhh
Trois secondes de silence peut-être, et puis je me suis jeté à l'eau.
" Ben, oui, je te le dis".
stupeur dans l'assemblée, mais je passe à la suite. Incrédulité d'un certains nombre d'élèves en fin de cours qui viennent me dire "C'est vrai ? Non, c'est pas vrai !?!"
Le bruit c'est immédiatement répandu dans le collège entre les élèves et ... cela n'a rien changé. Au début, c'est sûr que beaucoup de mes élèves de mes autres classes actuelles ou passées sont venus me voir pour me demander si c'est vrai ("Monsieur, j'peux vous poser une question ? Non, j'ose pas..
. Enfin, y a une rumeur
euh
" ou le plus direct "M'sieur, c'est vrai ce qu'on dit, vous êtes pd
".
Mais finalement il n'y a pas eu de réactions négatives. Les gosses sont plus curieux qu'autre chose - et même les élèves avec qui je me prends sévèrement le bec ne m'embêtent pas avec çà. La seule chose, c'est qu'il faut les recadrer dans le vocabulaire ("on dit pas pd mais gay mon p'tit") ou les limites ("non, cela ne se demande pas, si je fais l'homme ou la femme, voyons
).
Un non événement quoi. Comme quoi c'est possible.
Enfin, voilà, j'ai été un peu long, j'ai même peut-être un peu débordé du sujet (mais j'estime que cela rentrait plus dans ce sujet que dans le forum sur le coming-out).
Mais bon, tout cela pour conclure que l'information la plus importante de ce message est : eeeehhhhh oooooouuuuuiiiiiiiiiiiii !!!!!!!!!! Les petits nouveaux d'IUFM, vous allez venir en région parisienne (comme si l'éducation nationale nous laissait le choix!).
Mais je ne sais pas comment se font les premières affectations en Suisse, donc je ne sais pas, mon t'tit Olivier, si tu restera dans ton village.
Mais balise pas, ç sert à rien.
Tchao bise !
Je suis prof en collège, et la plupart des gens sont au courant de mon homosexualité, aussi bien les collègues que les élèves.
Et pourtant je suis près d'une cité pas forcément accueillante au premier abord (ils ont quand même brûler un chameau pendant les émeutes de novembre 2005, c'est tout dire !). Plus beaucoup d'élèves musulmans et un machisme primaire assez problématique. Alors c'est sûr au début on se dit qu'un coming-out, non merci.
Mais en fait, cela ne pose pas forcément de problème particulier. Explications.
Parlons d'abord des collègues : je dirais que cela peut être plus facile de faire son coming-out dans ce type d'établissement plus ou moins difficile, car l'équipe des profs est très jeune (logique, il y a énormément de nouveaux profs fraichement débarqués de l'IUFM - et oui, quand on est nouveau et célibataire, on a que 21 points pour les mutations la première année, alors vous faites pas d'illusion, il y a de très grandes chances pour que vous me rejoignez en région parisienne
Cela rend les choses plus simples, les relations plus vraies, et puis il ne faut pas oublier que cela parle énormément Q en salle des profs (
Parlons des élèves ensuite : je rejoins les témoignages et commentaires précédents. Les élèves ont pour première préoccupation de savoir si tu es un bon prof ou pas. S'ils ne t'aiment pas (généralement parce qu'ils considèrent que tu es un mauvais prof), c'est sûr, ils vont utiliser ton homosexualité comme argument pour te casser. Et là pas drole. Par contre, s'ils t'aiment bien (pour X raisons), ils n'en ont rien à faire.
Perso, j'ai fait mon coming-out auprès de mes èlèves en plein cours. C'était au moment des émeutes de novembre 2005. Alors forcément, je rebondis pé-da-go-gie pour faire le lien avec mon programme d'éducation civique sur l'égalité et les discriminations. Après avoir passé une heure avec eux pour tenter de trouver le pourquoi du comment des émeutes (dont certains ont du participer je pense), je consacre le cours suivant pour démontrer que les manifestations pacifiques mais militantes et une bonne représentation dans les médias sont bien plus efficaces que la méthode musclée et violente pour réclamer des droits et la fin des discriminations, en prenant l'exemple des LGTB.
A un moment du cours, je montre un montage de photos de personnages gays et lesbiens de séries télés, pour leur faire constater qu'ils en avaient une bonne image généralement, et que donc c'était efficace pour lutter contre les préjugés. J'en profite pour leur dire que cela sert aussi pour les jeunes gays et lesbiennes qui peuvent se sentir mieux en les voyant s'ils sont isolés - et que cela peut les encourager à faire leur coming-out. D'où effet boule de neige car leurs connaissances connaîtraient des LGBT et donc auraient une meilleure image des LGBT, etc... bon vous connaissez le topo, pas besoin de vous faire un dessin.
C'est alors qu'un de mes élèves "potentiellement difficile", qui participait énormément depuis qu'on parlait des émeutes (pour une fois !), m'a posé la question fatidique à 10.000 euros : "Et si les profs étaient gays, ils nous le diraient ? Par exemple, si vous vous l'étiez, vous nous le diriez ?"
Eeeeeeuuuuuuuuuuhhhhhhh
Trois secondes de silence peut-être, et puis je me suis jeté à l'eau.
" Ben, oui, je te le dis".
Le bruit c'est immédiatement répandu dans le collège entre les élèves et ... cela n'a rien changé. Au début, c'est sûr que beaucoup de mes élèves de mes autres classes actuelles ou passées sont venus me voir pour me demander si c'est vrai ("Monsieur, j'peux vous poser une question ? Non, j'ose pas..
Mais finalement il n'y a pas eu de réactions négatives. Les gosses sont plus curieux qu'autre chose - et même les élèves avec qui je me prends sévèrement le bec ne m'embêtent pas avec çà. La seule chose, c'est qu'il faut les recadrer dans le vocabulaire ("on dit pas pd mais gay mon p'tit") ou les limites ("non, cela ne se demande pas, si je fais l'homme ou la femme, voyons
Un non événement quoi. Comme quoi c'est possible.
Enfin, voilà, j'ai été un peu long, j'ai même peut-être un peu débordé du sujet (mais j'estime que cela rentrait plus dans ce sujet que dans le forum sur le coming-out).
Mais bon, tout cela pour conclure que l'information la plus importante de ce message est : eeeehhhhh oooooouuuuuiiiiiiiiiiiii !!!!!!!!!! Les petits nouveaux d'IUFM, vous allez venir en région parisienne (comme si l'éducation nationale nous laissait le choix!).
Mais je ne sais pas comment se font les premières affectations en Suisse, donc je ne sais pas, mon t'tit Olivier, si tu restera dans ton village.
Mais balise pas, ç sert à rien.
Tchao bise !
-
fredouille
- Messages : 8234
- Inscription : mer. juin 29, 2005 8:31 pm
tkf est ce que tu as eu des réactions positives ou négatives de la part des parents?
comment a réagi l'administration? et du côté de l'inspection académique?
je trouve ca trés courageux!
même si mon collège est loin de la région parisienne (mais bon, c'est quand meme un collège "Ambition réussite"...) je me vois mal (pour l'instant) annoncer ça à mes élèves...
c'est déjà pas évident de se faire respecter certains jours par certains gaillards, alors je ne voudrais pas qu'ils prennent mon homosexualité pour un signe de faiblesse...
comment a réagi l'administration? et du côté de l'inspection académique?
je trouve ca trés courageux!
même si mon collège est loin de la région parisienne (mais bon, c'est quand meme un collège "Ambition réussite"...) je me vois mal (pour l'instant) annoncer ça à mes élèves...
c'est déjà pas évident de se faire respecter certains jours par certains gaillards, alors je ne voudrais pas qu'ils prennent mon homosexualité pour un signe de faiblesse...
Dernière modification par max62 le mer. juin 07, 2006 9:23 am, modifié 1 fois.
+1, waouh, quel courage, surtout quand on sait que l'institution te soutient comme une branche pourrie sur laquelle t'es assis au moindre petit problème !max62 a écrit :tkf est ce que tu as eu des réactions positives ou négatives de la part des parents?
comment a réagi l'administration? et du côté de l'inspection académique?
je trouve ca trés courageux!
T'as pris de sacrés risques, c'est bien, je ne crois pas que j'en aurais fait autant ! (smilie chapeau à inventer ou trouver).
-
UnExMembre
sijaro a écrit :
En même temps, c'est plus facile à faire passer dans certaines matières, je ne sais pas de quoi tu es prof, mais si on veut faire passer le message en l'inscrivant dans une démarche pédagogique, ce qui est indispensable me semble-t-il, comme tu l'as si bien fait, ce n'est vraiment pas évident en tant que prof de maths, et j'ai pourtant retourné le problème sous toutes les coutures...
je pense qu'on peut aborder ce thème dans beaucoup de disciplines
pour les maths tu peux aborder ça sous forme de statistiques ou de problème de maths (du genre : sachant que environ 6% des 60 millions de Français sont gay, calculer le nombre d'hétéros)
les prétextes ne sont pas difficiles à trouver pour lancer un débat, le plus difficile c'est d'avoir le courage de lancer ce débat...
-
ExMembre L
ouaaaah, c'est la folie de faire ça!!!
putain! j'oserais jamais, je crois!! enfin... à vrai dire, j'en sais trop rien, mais je crois que non. En admettant même que j'ai suffisament confiance en quelques élèves pour le leur dire, j'aurais trop peur des retombées sur les années suivantes et le reste des enfants de la cité (bah c'est tous des cousins, donc bon...)
mais ouhaou! c'est très encourageant. Si un jour je le fais je me précipite pour vous le dire, mais j'aurais un peu peur que ça finisse en épisode dramatique....ça n'empêche que je crée souvent le débat autour de ça
....mais même un débat j'ai du mal!
putain! j'oserais jamais, je crois!! enfin... à vrai dire, j'en sais trop rien, mais je crois que non. En admettant même que j'ai suffisament confiance en quelques élèves pour le leur dire, j'aurais trop peur des retombées sur les années suivantes et le reste des enfants de la cité (bah c'est tous des cousins, donc bon...)
mais ouhaou! c'est très encourageant. Si un jour je le fais je me précipite pour vous le dire, mais j'aurais un peu peur que ça finisse en épisode dramatique....ça n'empêche que je crée souvent le débat autour de ça
....mais même un débat j'ai du mal!
Bon, moi mes élèves ont 9-10 ans. Sont encore jeunots et j'aborde pas ma vie privée avec eux mais, même s'ils étaient plus âgés, impossible pour moi de parler avec eux de ma vie privée et de mon orientation sexuelle. Je préfère conserver ma distance avec eux tout simplement. Avec mes ami(e)s et ma famille, ok mais avec mes élèves, pas du tout...lulu galipette a écrit : putain! j'oserais jamais, je crois!!
En tout cas, tkf, si ça t'a aidé à mieux te sentir et si ça t'a apporté pas mal de choses, pourquoi pas !
-
fredouille
- Messages : 8234
- Inscription : mer. juin 29, 2005 8:31 pm