"Nous avons fait un grand effort et nous avons été très près du but" a déclaré, sereine, Mme Bachelet, qui n'avait pas caché son ambition de l'emporter dès le premier tour, comme le prédisaient les enquêtes d'opinion. "Je suis très contente" a affirmé, souriante, Mme Matthei, qui a dépassé les scores de 14 à 21 % annoncés par les sondages. Le soutien électoral historique de la droite est de 40 % mais celle-ci est affaiblie par de profondes divisions.
Avec 11 % des voix, arrive en troisième position le socialiste dissident Marco Enriquez-Ominami (40 ans). Il avait provoqué la surprise, lors de la présidentielle de 2009, où il avait obtenu 20 % des voix, rompant avec le bipartisme traditionnel au Chili. Les Chiliens votaient également, dimanche, pour renouveler la totalité de la Chambre des députés et plus de la moitié du Sénat (20 sénateurs sur 38). D'après des résultats provisoires, la coalition de la Nouvelle Majorité, conduite par Mme Bachelet et regroupant démocrates-chrétiens, socialistes et, pour la première fois depuis quarante ans, les communistes, aurait conquis la majorité au Congrès. Une majorité simple qui n'est toutefois pas suffisante pour faire adopter des lois importantes, qui requièrent une majorité qualifiée, de quatre septièmes.
Quatre anciens dirigeants de la révolte étudiante qui ébranlèrent le Chili en 2011 ont obtenu des sièges de députés. Parmi eux, la "passionaria" communiste Camila Vallejo, 25 ans, devenue célèbre au-delà des frontières du Chili. Médecin de formation, Michelle Bachelet, qui fut ministre de la santé en 2000 et, deux ans plus tard, première femme ministre de la défense d'Amérique latine, a axé sa campagne sur des propositions fortes ayant pour but d'en finir avec l'héritage du général Augusto Pinochet (1973-1990), en particulier une réforme de la Constitution, datant de la dictature militaire, une réforme du système fiscal et de l'éducation.
Economiste et ancienne ministre du travail du président sortant, l'homme d'affaires Sebastian Piñera – premier président de droite depuis le retour de la démocratie –, Evelyn Matthei défend la contunuité du modèle libéral suivi ces dernières années. Ce duel de femmes est inédit au Chili.
Rivales politiques, les deux candidates se connaissent depuis l'enfance et appartiennent, toutes deux, à la famille militaire chilienne. Leurs pères étaient amis. Le coup d'Etat militaire du 11 septembre les a séparés, tragiquement. Le général Alberto Bachelet, fidèle à Salvador Allende, est mort à 51 ans, des suites des tortures infligées par ses pairs. Le général Fernand Matthei fit partie de la junte militaire. Michelle Bachelet et sa mère furent elles-mêmes torturées et durent partir en exil. Evelyn Matthei défend pour sa part la figure de Pinochet.
Le président Piñera a indiqué que 55 % des 13 millions d'électeurs ont voté. L'abstention avait atteint 60 % lors des municipales d'octobre 2012. Pour la première fois, le vote n'était pas obligatoire et l'inscription sur les listes électorales était automatique.
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